Conseil 20181892 - Séance du 13/09/2018

Conseil 20181892 - Séance du 13/09/2018

Mairie de Montaut

La commission d'accès aux documents administratifs a examiné dans sa séance du 13 septembre 2018 votre demande de conseil relative à la diffusion sur la page Facebook de votre commune des documents mis à l'affichage en mairie, à savoir :
1) les arrêtés ;
2) le procès-verbal des conseils municipaux ;
3) les arrêtés de décision d'urbanisme ;
4) le menu de la cantine scolaire ;
ou avec restrictions pour certains documents, notamment :
5) les arrêtés d'urbanisme où apparait le nom du demandeur.

La commission rappelle que l’article L312-1 du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) prévoit que les administrations peuvent rendre publics les documents administratifs qu’elles produisent ou reçoivent. Le législateur leur a également imposé l’obligation de publier en ligne certaines catégories particulières de documents (article L312-1-1 du CRPA).

A cet égard, vous interrogez la commission sur le point de savoir si une disposition qui prévoit l'affichage obligatoire d'un document administratif en mairie vaut également autorisation de le diffuser, dans les mêmes conditions, sur internet.

La commission relève que de nombreuses dispositions législatives ou réglementaires prévoient l'affichage de documents communaux. Il en va ainsi, par exemple et sans être exhaustif, de la convocation et de l'ordre du jour du conseil municipal (article L2121-10 du code général des collectivités territoriales), du compte rendu du conseil municipal (article L2121-25 du même code), d'un arrêté de déclaration d'utilité publique (article L2243-4), de la nomination des adjoints au maire (article R2122-1), du tarif de la taxe de séjour temporaire (article R2333-55), ou encore, par exemple, d'un avis de dépôt de demande de permis ou de déclaration préalable (article R423-6 du code de l'urbanisme), d'un extrait d'autorisation d'urbanisme (article R424-15 du code de l'urbanisme) ou de bans de mariage (article 63 du code civil).

La commission considère traditionnellement que l'affichage d'un document ne peut être assimilé à une diffusion publique au sens des articles L311-2 et L321-1 du CRPA. Elle estime en effet qu'une diffusion publique au sens de cette loi requiert que le document soit aisément accessible techniquement, géographiquement et financièrement, ce qui n'est pas le cas lorsqu'un document est uniquement affiché de façon temporaire à un endroit déterminé. Compte tenu de la différence de portée entre une publication par voie d'affichage et une publication en ligne, la commission en déduit que la circonstance qu'un texte législatif ou réglementaire prévoit qu'un document doit être affiché, ne signifie pas nécessairement que celui-ci puisse être publié en ligne dans les mêmes conditions.

La publication en ligne de documents administratifs par l’administration doit s’effectuer dans le respect des conditions posées à l’article L312-1-2 du CRPA, qui dispose que : « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, lorsque les documents et données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des mentions entrant dans le champ d'application des articles L311-5 ou L311-6, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant d'occulter ces mentions. / Sauf dispositions législatives contraires ou si les personnes intéressées ont donné leur accord, lorsque les documents et les données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des données à caractère personnel, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes. Une liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement susmentionné est fixée par décret pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. (...) ».

La commission déduit de ces dispositions les règles suivantes :

Pour pouvoir faire l’objet d’une publication en ligne sur internet par l’administration, un document administratif doit, en premier lieu, au regard des mentions qu’il contient, être communicable à toute personne.

Il y a lieu de distinguer selon que la communication du document est régie par les dispositions du livre III du CRPA ou par une législation spéciale.

a) Lorsque la communication d’un document est soumise aux dispositions du CRPA, notamment des articles L311-5 et L311-6 de ce code, il ne peut être procédé à la publication de ce document que si son contenu respecte les secrets protégés par ces deux articles.

Par exemple, un marché public de travaux conclu par la commune ne sera communicable à toute personne qui en fait la demande, et donc publiable, que sous réserve de l'occultation préalable des mentions couvertes par le secret des affaires de la société cocontractante protégé par le 1° de l'article L311-6 du CRPA.

b) En revanche, lorsque la communication d’un document relève d'une législation spéciale qui n’inclut pas les articles L311-5 et L311-6 du CRPA, le contenu du document doit, pour pouvoir être publié, se conformer aux règles et principes issus de cette législation particulière et qui conditionnent sa communicabilité à toute personne.

Constitue une législation spéciale qui déroge au régime de droit commun d’accès aux documents administratifs prévu par le titre Ier du livre III du CRPA, l'article L2121-26 du code général des collectivités territoriales (CGCT), aux termes duquel : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des procès-verbaux du conseil municipal, des budgets et des comptes de la commune et des arrêtés municipaux. Chacun peut les publier sous sa responsabilité. La communication des documents mentionnés au premier alinéa, qui peut être obtenue aussi bien du maire que des services déconcentrés de l’État, intervient dans les conditions prévues par l'article L311-9 du code des relations entre le public et l'administration. Les dispositions du présent article s'appliquent aux établissements publics administratifs des communes. ». En effet, le Conseil d’État a jugé, dans sa décision n° 303814 Commune de Sète du 10 mars 2010, à propos de l'article L2121-26 du CGCT applicable aux communes, que ces dispositions instituent un régime particulier et autonome de communication, en vertu duquel les exceptions au droit d’accès prévues par les articles L311-5 et L311-6 du CRPA ne sont pas opposables à une demande présentée sur leur fondement.

Les principes alors applicables sont ceux qui découlent de la jurisprudence « Commune de Sète ». Il résulte ainsi de cette décision, rendue à propos d’un arrêté individuel d’attribution de primes liées à la manière de servir, que ces dispositions du CGCT ne sauraient être interprétées, eu égard à leur objectif d’information du public sur la gestion municipale, comme prescrivant la communication des arrêtés portant des appréciations d’ordre individuel sur les fonctionnaires communaux.

La commission a estimé que les objectifs de transparence de la vie locale ne justifiaient pas qu'il soit dérogé au secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), au secret de la vie privée (conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), ou au secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011). La commission considère, en revanche, qu'il n'y a pas lieu, en principe, d'opposer le secret des affaires sur le fondement de l'article L2121-26 du CGCT (pour les communes) ou de l'article L5211-46 (pour les établissements publics de coopération intercommunale).

Il s'ensuit, par exemple, qu'une délibération d'un centre communal d'action sociale (CCAS), établissement public administratif communal, portant sur l'attribution d'un secours individuel, ne pourra être communiquée à d'autres personnes que la personne intéressée par cette aide, ni par suite publiée, en application de l'article L2121-26 du CGCT, dès lors qu'elle est susceptible de porter atteinte au secret de la vie privée de cette personne. En revanche, les budgets et les comptes de la commune, qui sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L2121-26 du CGCT, sont également intégralement publiables en ligne.

Dès lors qu'une disposition qui prévoit l'affichage d'un document n'autorise pas par elle-même sa publication en ligne, il n'est donc pas possible en principe de communiquer à des tiers, ni de publier en ligne des données relatives à des personnes physiques, qui seraient susceptibles de porter atteinte à leur vie privée ou qui porteraient une appréciation ou un jugement de valeur sur celles-ci, sauf dispositions législatives contraires.

La commission relève en outre que certains documents administratifs comportent des données personnelles qui ne sont pas couvertes en tant que telles par le secret de la vie privée. Il en va ainsi par exemple d'un arrêté de nomination d'un agent communal ou au sein d'un dossier d'autorisation d'urbanisme, des mentions relatives au nom et à l'adresse du bénéficiaire. Lorsqu'un document administratif comporte de telles données à caractère personnel, il doit alors, pour pouvoir être publié en ligne, satisfaire aux conditions posées au deuxième alinéa de l’article L312-1-2 du CRPA. Il résulte de ces dispositions que des documents comportant des données personnelles ne peuvent être publiés en ligne que s'ils ont fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes, ou dans les trois hypothèses suivantes :
- si une disposition législative autorise une telle publication sans anonymisation : il résulte de ce qui a été dit plus haut qu'une disposition législative qui se bornerait à prévoir l'affichage d'un document ne permet pas de publier un document comportant des données personnelles sans anonymisation ;
- si les personnes intéressées ont donné leur accord ;
- si les documents figurent dans la liste prévue par le décret mentionné au deuxième alinéa de l'article L312-1-2 du CRPA. Ce décret, qui n'a pas encore été adopté, doit en effet fixer la liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet d'une anonymisation.

En l'état actuel des textes et en l'absence, pour l'heure, d'adoption du décret visé au deuxième alinéa de l'article L312-1-2 du CRPA, la commission considère, comme elle l'a fait dans son conseil n° 20163827 du 17 novembre 2016, que, pour l'application du deuxième alinéa du même article, il y a lieu de distinguer selon la nature de l'auteur de la demande d'autorisation d'urbanisme. Dans le cas où il s'agit d'une personne physique ou d'une entreprise unipersonnelle, les informations qui apparaissent sur les documents qui s'y rapportent revêtent la nature de données à caractère personnel, au sens de l'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 et de l'article L312-1-2 du code des relations entre le public et l'administration. La commission estime que, dans cette hypothèse, les dispositions du deuxième alinéa de cet article L312-1-2, qui imposent de rendre impossible l'identification des personnes en cause, obligent à occulter, avant publication sur l'internet, le nom du demandeur et l'adresse du terrain, laquelle pourrait permettre d'identifier le demandeur. En d'autres termes, si l'avis de dépôt d'une demande d'autorisation d'urbanisme ou un arrêté portant autorisation d'urbanisme peuvent être affichés en mairie sans occultation du nom et de l'adresse du pétitionnaire, ces mentions devront en revanche être occultées avant toute publication en ligne, sauf à avoir obtenu préalablement l'accord de la personne intéressée.

La commission considère que les arrêtés du maire de la commune et les procès-verbaux des conseils municipaux ne peuvent être communiqués et publiés en ligne que sous réserve de l'occultation des mentions à protéger en application de la jurisprudence « Commune de Sète » et du respect des dispositions du deuxième alinéa de l'article L312-1-2 du code des relations entre le public et l'administration.

Enfin, le menu de la cantine scolaire peut être publié quant à lui dans son intégralité.