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Avis 20181609 - Séance du 12/07/2018
Madame X a saisi la commission d’accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 28 mars 2018, du refus opposé par la commune de Véron à sa demande de communication d’une copie du rapport d'enquête établi conformément aux dispositions de l'article L131-10 du code de l'éducation.
La commission relève qu'aux termes de l'article L131-1-1 du code de l'éducation : « Le droit de l'enfant à l'instruction a pour objet de lui garantir, d'une part, l'acquisition des instruments fondamentaux du savoir, des connaissances de base, des éléments de la culture générale et, selon les choix, de la formation professionnelle et technique et, d'autre part, l'éducation lui permettant de développer sa personnalité, son sens moral et son esprit critique, d'élever son niveau de formation initiale et continue, de s'insérer dans la vie sociale et professionnelle, de partager les valeurs de la République et d'exercer sa citoyenneté. / Cette instruction obligatoire est assurée prioritairement dans les établissements d'enseignement. » Aux termes du premier alinéa de l'article L131-2 du même code : « L'instruction obligatoire peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles par les parents, ou l'un d'entre eux, ou toute personne de leur choix. (...) ». Selon l’article L131-6 du code de l'éducation, afin de contrôler le respect de l'obligation scolaire, chaque année, « à la rentrée scolaire, le maire dresse la liste de tous les enfants résidant dans sa commune et qui sont soumis à l'obligation scolaire. Les personnes responsables doivent y faire inscrire les enfants dont elles ont la garde ». Parallèlement, en application de l'article L131-5 du même code, les personnes responsables d'un enfant soumis à l'obligation d'instruction, qui n'ont pas inscrit leur enfant dans un établissement scolaire public ou privé et qui désirent l'instruire à domicile, doivent chaque année déclarer au maire de la commune de résidence et à l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale, qu'elles feront donner l'instruction dans la famille. Enfin, l’article L131-10 du code de l'éducation prévoit : « Les enfants soumis à l'obligation scolaire qui reçoivent l'instruction dans leur famille, y compris dans le cadre d'une inscription dans un établissement d'enseignement à distance, sont dès la première année, et tous les deux ans, l'objet d'une enquête de la mairie compétente, uniquement aux fins d'établir quelles sont les raisons alléguées par les personnes responsables, et s'il leur est donné une instruction dans la mesure compatible avec leur état de santé et les conditions de vie de la famille. Le résultat de cette enquête est communiqué à l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation./ Lorsque l'enquête n'a pas été effectuée, elle est diligentée par le représentant de l'Etat dans le département./ L'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation doit au moins une fois par an, à partir du troisième mois suivant la déclaration d'instruction par la famille, faire vérifier que l'enseignement assuré est conforme au droit de l'enfant à l'instruction tel que défini à l'article L131-1-1./ Ce contrôle prescrit par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation a lieu notamment au domicile des parents de l'enfant. Il vérifie notamment que l'instruction dispensée au même domicile l'est pour les enfants d'une seule famille./ Ce contrôle est effectué sans délai en cas de défaut de déclaration d'instruction par la famille, sans préjudice de l'application des sanctions pénales./ Le contenu des connaissances requis des élèves est fixé par décret./Les résultats de ce contrôle sont notifiés aux personnes responsables avec l'indication du délai dans lequel elles devront fournir leurs explications ou améliorer la situation et des sanctions dont elles seraient l'objet dans le cas contraire./Si, au terme d'un nouveau délai fixé par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, les résultats du contrôle sont jugés insuffisants, les parents sont mis en demeure, dans les quinze jours suivant la notification, d'inscrire leur enfant dans un établissement d'enseignement public ou privé et de faire connaître au maire, qui en informe l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, l'école ou l'établissement qu'ils auront choisi. ».
La commission constate que les dispositions précitées prévoient des modalités particulières de communication des résultats du contrôle effectué par l’Etat sur la conformité de l'enseignement assuré au droit de l'enfant à l'instruction par l'envoi d'une mise en demeure qui, si elle n'est pas suivie d'effets peut conduire aux sanctions pénales prévues par l'article 227-17-1 du code pénal, tel qu'interprété par la décision n° 2018-710 QPC du 1er juin 2018 du Conseil constitutionnel s'agissant des sanctions prononcées à l'encontre des établissements privés accueillant des classes hors contrat.
En revanche, le législateur est resté muet sur la communication aux responsables légaux des résultats de l’enquête conduite par la commune en application du premier alinéa de l’article L131-10 du code de l'éducation en cas d'instruction délivrée par la famille, qui constitue un document administratif dès lors qu'il est établi par une autorité administrative dans le cadre des missions que lui a confiées le législateur. La commission estime, d'une part, que ce silence ne saurait être interprété comme ayant entendu faire obstacle au droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. La commission en déduit que le résultat de celle-ci est communicable aux titulaires de l’autorité parentale de l'enfant recevant l'instruction dans sa famille sur ce fondement. Elle considère, d'autre part, que cette enquête, y compris lorsqu'elle est diligentée à la demande du préfet en cas de carence du maire, qui porte exclusivement sur les raisons alléguées par les personnes responsables d'un enseignement à domicile et sur la compatibilité de ce mode d'instruction avec l'état de santé des enfants et les conditions de vie de la famille, est dissociable du contrôle effectué par l'autorité de l'Etat en matière d'éducation sur l'enseignement lui-même et qu'elle ne revêt donc pas le caractère d'un document préparatoire à l'éventuelle décision de cette autorité dans le cadre du contrôle que le législateur lui a confié. Elle est donc communicable dès sa transmission au représentant de l'Etat en matière d'éducation par le maire ou, en cas de carence de ce dernier, par le préfet. La communication doit toutefois s'opérer après occultation, le cas échéant, des mentions susceptibles, soit de révéler de la part de personnes autres que les agents chargés de conduire l’enquête un comportement susceptible de leur porter préjudice, soit de porter atteinte à la recherche et à la prévention, par les services compétents, d'infractions de toute nature, en application, respectivement, du 3° de l’article L311-6 et du g) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration.
Ayant pris connaissance du rapport dont la communication est demandée, la commission émet, en l'espèce, un avis favorable à la demande.