Avis 20184234 - Séance du 28/02/2019

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Avis 20184234 - Séance du 28/02/2019

Ministère de la Justice

Monsieur X, pour l'association X, a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 3 septembre 2018, à la suite du refus opposé par la garde des sceaux, ministre de la justice à sa demande de copie de la note d'information à destination des magistrats, publiée sur le site intranet de la direction des affaires civiles et du sceau, évoquée par la ministre de la Justice lors de sa réponse à la question écrite n° 02674.

La commission observe qu’en réponse à une question d’une sénatrice sur la prise en compte du syndrome d'aliénation parentale (SAP) dans les jugements rendus par les juges pour enfants, la garde des sceaux, ministre de la justice a indiqué : « En vertu du principe de la séparation des pouvoirs, aucune circulaire ne peut être diffusée auprès des juges aux affaires familiales pour préconiser l'utilisation ou, à l'inverse, pour proscrire l'utilisation de tel ou tel concept lorsque le juge est saisi. De même, on ne saurait préciser l'appréciation qui doit être faite par les juges de la vraisemblance de l'emprise d'un parent sur l'enfant au détriment de l'autre parent. En revanche, une note d'information a été mise en ligne sur le site intranet de la direction des affaires civiles et du sceau du ministère de la justice pour informer les magistrats du caractère controversé et non reconnu du syndrome d'aliénation parentale, les inciter à regarder avec prudence ce moyen lorsqu'il est soulevé en défense et leur rappeler que d'autres outils sont à leur disposition en matière civile pour faire face aux situations parfois réelles d'un parent qui tenterait d'éloigner progressivement l'enfant de l'autre parent. »

C’est cette note d’information dont la communication est sollicitée.

La commission rappelle qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions. Les actes et documents produits ou reçus par les assemblées parlementaires sont régis par l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. »

La commission rappelle également que, selon la décision du Conseil d’Etat du 7 mai 2010 n° 303168, les documents, quelle que soit leur nature, qui sont détenus par les juridictions et qui se rattachent à la fonction de juger dont elles sont investies, n’ont pas le caractère de documents administratifs et n'entrent donc pas dans le champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l’administration.

En l'espèce, la commission, qui n’a pu prendre connaissance du document concerné, constate toutefois qu’il consiste exclusivement en des recommandations générales émanant des services du ministère de la justice à destination des magistrats judiciaires portant sur le syndrome d’aliénation parentale.

Ce document ne se rapporte donc à aucune instance dont les juridictions en cause seraient saisies, ne concourt ni à l'instruction d’une affaire déterminée, ni à la formation d’un jugement donné, et n’est pas relatif à la composition des formations de jugement. Par ailleurs, s’il s’agit d’un document de travail interne destiné aux magistrats, la commission estime qu’il ne revêt pas le caractère d’un document juridictionnel. En effet, si ce document est effectivement en lien avec la fonction de juger, la généralité de son objet et sa portée, justifient qu’il soit détachable de l’activité juridictionnelle, et regardé comme un document administratif entrant dans le champ du droit d’accès prévu au livre III du code des relations entre le public et l’administration pour lequel elle est compétente.

Elle estime par conséquent, en l’absence de toute mention susceptible d’être couverte par l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, que ce document administratif est librement communicable à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L311-1 du même code et émet un avis favorable.