Avis 20210157 - Séance du 25/03/2021
Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 décembre 2020, à la suite du refus opposé par le maire de Meylan à sa demande de copie des documents suivants :
1) l'organigramme des services techniques et administratifs sur l'ancienne municipalité ;
2) l'organigramme actuel ;
3) les arrêtés relatifs aux rémunérations et avantages de l'actuelle personne occupant la fonction de DGS ;
4) l'intégralité des pièces se rapportant au « marché de prestation de service qui devait numériser l'ensemble de ce registre volumineux (R332/41) », dont rapports préalables, documents des commissions d'appel d'offres, tous courriers et rapports de commissions internes, dont marchés et juridiques, et exploitations dont courriers/ rapports et toutes pièces comptables dont mandatements.
La Commission, qui a pris connaissance de la réponse du maire de Meylan, relève qu'à la date de sa séance, les documents mentionnés aux points 1) et 2) de la demande n'ont pas fait l'objet d'une diffusion publique sur le site Internet de la commune. Elle estime que ces documents, sous réserve s'agissant du point 2) qu'il soit achevé, sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Elle émet, dès lors, un avis favorable à la demande.
S'agissant des documents mentionnés au point 3), la Commission constate que ce sont tant les arrêtés relatifs à la rémunération de l'ancien directeur général des services de la commune que ceux relatifs à la rémunération de l'actuel titulaire du poste dont la communication a été sollicitée par Monsieur X.
La Commission rappelle que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Elle admet toutefois que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées. Il en est ainsi, notamment, de la qualité d'agent public, de l'adresse administrative et, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci : grade et échelon, indice de traitement, nouvelle bonification indiciaire (NBI), indemnités de sujétion. La Commission estime cependant que, si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime.
Ainsi, s'agissant des éléments de rémunération, la Commission est défavorable à la communication des informations liées, soit à la situation familiale et personnelle (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur la manière de servir de l'agent (primes pour travaux supplémentaires, primes de rendement), ou encore de celles relatives aux horaires de travail, aux indemnités et heures supplémentaires. Il en va de même, pour le cas où la rémunération comporterait une part variable, du montant total des primes versées ou du montant total de la rémunération, dès lors que ces données, combinées avec les composantes fixes, communicables, de cette rémunération, permettraient de déduire le sens de l'appréciation ou du jugement de valeur porté sur l'agent.
En l'espèce, la Commission relève que le maire de Meylan a communiqué à Monsieur X la copie d'arrêtés relatifs à la rémunération de l'ancien directeur général des services de la commune après avoir occulté le nom de celui-ci, alors-même qu'aucun de ces arrêtés ne comportait la moindre information relative à la situation familiale et personnelle de l'agent ni aucun élément relatif à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir. La Commission émet en conséquence un avis favorable à la communication intégrale de ces arrêtés, sans qu'il y ait lieu, en l'espèce, d'occulter le nom de l'agent concerné.
En ce qui concerne l'actuel directeur général des services de la commune, la Commission émet également un avis favorable à la communication des arrêtés concernant sa rémunération, sous les réserves rappelées ci-dessus relatives à la situation familiale et personnelle de cet agent ainsi qu'à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur sa manière de servir.
S'agissant du point 4) de la demande, la Commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. En conséquence, la communication à un candidat écarté des motifs ayant conduit la commission d'appel d'offres à ne pas lui attribuer le marché ne permet pas de refuser la communication de ces documents.
Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code.
Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, Centre hospitalier de Perpignan (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi du bordereau des prix unitaires.
L'examen de l’offre d’une entreprise attributaire au regard du respect du secret des affaires conduit ainsi la Commission à considérer que l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ne sont pas communicables aux tiers, sans qu’il soit besoin de s’interroger sur le mode de passation, notamment répétitif, du marché ou du contrat, sa nature, sa durée ou son mode d’exécution.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la Commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres) les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
La Commission précise enfin que les notes et classements des entreprises non retenues ne sont communicables qu'à celles-ci, chacune en ce qui la concerne, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. En revanche, les notes, classements et éventuelles appréciations de l'entreprise lauréate du marché sont librement communicables.
La Commission émet dès lors, sous les réserves ainsi émises, un avis favorable à la communication des pièces visées au point 4) de la demande.
Enfin, en réponse à la demande qui lui a été adressée, le maire de Meylan a indiqué à la Commission qu’elle considérait la demande de Monsieur X comme abusive. La Commission souligne cependant qu'une demande ne peut être considérée comme abusive que lorsqu'elle vise de façon délibérée à perturber le fonctionnement d'une administration ou à faire peser sur elle une charge excessive au regard des moyens dont elle dispose. Toute demande portant sur une quantité importante de documents ou le fait pour une même personne de présenter plusieurs demandes à la même autorité publique ne sont pas nécessairement assimilables à des demandes abusives. En l'espèce, il ne lui est pas apparu, compte tenu de la nature des documents demandés, du destinataire de la demande et des éléments portés à sa connaissance, que cette demande présenterait un caractère abusif.