Avis 20216586 - Séance du 16/12/2021
Maître X, conseil de Messieurs X et X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 19 octobre 2021, à la suite du refus opposé par le directeur général des finances publiques à sa demande de communication, dans le cadre du contrôle de la déclaration de succession de Monsieur X décédé le X, des documents par lesquels l'administration fiscale a pris connaissance du fait que Monsieur X était détenteur des comptes n° X et X en Suisse auprès du X.
La commission rappelle à titre liminaire qu'elle n'est pas compétente pour se prononcer sur les droits d'information que les contribuables tirent de textes particuliers tel l'article L76 B du livre des procédure fiscales qui dispose que : « L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L57 ou de la notification prévue à l'article L76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ». Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que les contribuables puissent se prévaloir du droit d'accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment de la nature des impositions auxquelles ces contribuables ont été assujettis ou des opérations de contrôle mises en œuvre à leur égard par l'administration.
La commission rappelle ensuite que les dispositions de l'article L103 du livre des procédures fiscales, qui imposent le secret professionnel à toutes les personnes appelées, à l'occasion de leurs fonctions ou attributions, à intervenir dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des impôts, droits, taxes et redevances prévus au code général des impôts, telles qu'interprétées par le juge administratif, font obstacle, sauf disposition législative dérogatoire, à ce que l'administration communique à un tiers des informations concernant un contribuable, en l'absence d'accord exprès de sa part, dès lors que le tiers n'est pas débiteur solidaire de cet impôt.
Il en résulte que les documents fiscaux concernant une personne décédée ne sont communicables à ses successeurs, en l'absence d'accord exprimé de son vivant, que si ceux-ci sont personnellement mis en cause pour le paiement d'une éventuelle dette fiscale transmise par la succession.
La commission comprend que tel est le cas en l'espèce, les demandeurs ayant fait l'objet de rappels de droits de succession dans le cadre de la succession de leur père.
La commission rappelle enfin que le dossier fiscal d’un contribuable lui est communicable, en application de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve de l’occultation préalable des éventuelles mentions qu’il contiendrait susceptibles de porter atteinte à la recherche des infractions en matière fiscale, en application du g) du 2° de l’article L311-5 et de l’article L311-7 du même code. Sont notamment couvertes par le secret les informations précises sur l’origine de la vérification, sur la source des renseignements obtenus par l’administration fiscale ou sur les méthodes utilisées par le vérificateur.
La commission, qui a pris connaissance de la réponse du directeur général des finances publiques, comprend que la demande de Maître X vise le document par lequel l’existence de comptes bancaires détenus en Suisse par le père décédé de ses clients a été porté à la connaissance des autorités françaises. Elle prend note, compte tenu de la médiatisation de cette situation, de ce que celui-ci consisterait en un signalement effectué en 2013 par un informateur lequel aurait transmis des informations internes au X.
La commission relève, à ce titre, que le recours aux aviseurs fiscaux a été institutionnalisé à l’article L10-0 AC du livre de procédures fiscales lequel prévoit notamment que l’administration peut « recevoir et exploiter » les renseignements transmis dans le cadre des procédures de contrôle de l’impôt, même si leur origine est irrégulière, à l’exception des visites domiciliaires, mentionnées à l’article L16 B du même livre. Elle note que la préservation de l’anonymat de telles sources est consubstantielle à un tel dispositif.
La commission estime néanmoins qu’en toute hypothèse, que le document transmis aux autorités françaises ait une origine officielle ou non, qu’il ait été transmis aux autorités françaises par une personne l’ayant elle-même obtenu régulièrement ou non, il a trait tant à l’origine du contrôle visant aujourd’hui les héritiers de Monsieur X, à la source des renseignements obtenus par l’administration fiscale qu’aux moyens de recherche mis en œuvre par les services en vue de mener à bien une opération de contrôle, et ceci alors même qu’ils revêtiraient un caractère sommaire.
La commission a d’ailleurs pu estimer qu’étaient couverts par le secret les documents permettant de connaître l'origine et les circonstances ayant conduit le service à contrôler les déclarations de revenus d’un contribuable et à lui adresser dans ce cadre une demande de renseignements sur le fondement de l'article L10 du livre des procédures fiscales (avis n° 20165432 du 19 janvier 2017), de même, que les justificatifs d’une demande d’assistance internationale (avis n° 20192946 du 16 janvier 2020).
La commission émet donc un avis défavorable à la demande.