Conseil 20220342 - Séance du 10/03/2022

Conseil 20220342 - Séance du 10/03/2022

Centre Hospitalier d'Arcachon

La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 10 mars 2022 votre demande de conseil relative au caractère de document administratif communicable, à la mutuelle X, des justificatifs de demande de chambre individuelle pour plus de 3 000 patients entre 2016 et 2021, lesquels font partie de leur dossier administratif, ainsi qu’au caractère abusif de cette demande.

En premier lieu, la commission précise qu’aux termes de l’article R162-32-2 du code de la sécurité sociale, en vigueur jusqu’au 9 avril 2017, devenu l’article R162-27 du code de sécurité sociale : « Les catégories de prestations pour exigences particulières du patient, sans fondement médical, (…), qui donnent lieu à facturation sans prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, (…), sont les suivantes : 1° L'installation dans une chambre particulière, en l'absence de prescription médicale imposant l'isolement, en cas d'hospitalisation. (…) L'établissement doit informer le patient du prix de ces prestations, pour lesquelles il établit une facture détaillée conformément aux dispositions de l'article L441-3 du code de commerce. ». L’article R1112-18 du code de la santé publique dispose, en outre, que : « Les établissements peuvent comporter soit un régime unique d’hospitalisation qui constitue le régime commun, soit deux régimes d’hospitalisation, le régime commun et le régime particulier lequel comprend des chambres à un lit. ». L’article R1112-22 du même code prévoit, par ailleurs, que : « Lorsque les malades autres que les bénéficiaires de l'aide médicale optent pour le régime particulier ou l'activité libérale des praticiens hospitaliers, l'option est formulée par écrit, dès l'entrée du malade par lui-même, un membre de sa famille ou un proche, après que l'intéressé a pris connaissance des conditions particulières qu'implique le choix de l'une ou de l'autre de ces catégories. L'engagement de payer les suppléments au tarif de prestations, qui doivent être précisément indiqués, est signé en même temps, sous réserve, en ce qui concerne les assurés sociaux, des conventions entre les établissements publics de santé et les organismes prenant en charge les frais de soins. ».

La commission relève, à la lecture de ces dispositions combinées, que l’installation d’un patient dans une chambre particulière sans fondement médical, à l’occasion d’une hospitalisation, donne lieu à facturation sans prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Cette facturation est subordonnée à la demande expresse et écrite du patient, qui doit être informé des conséquences qu’implique ce choix, du prix de la prestation et qui doit, en outre, s’engager à payer ces frais, sous réserve qu’une convention ait été conclue entre l’établissement public de santé et l’organisme prenant en charge les frais de soin. Cette demande se matérialise en règle générale, comme en l’espèce, par un formulaire ou une fiche de demande en chambre particulière que chaque patient est invité à compléter et à signer lors de son admission.

La commission estime que ces documents sont détenus par les établissement publics de santé dans le cadre de leurs missions de service public et revêtent, dès lors, le caractère de documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. S’agissant de documents ne comportant aucune information médicale, conservés dans le dossier administratif d’hospitalisation des patients, le régime de communication applicable est celui prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration.

La commission précise, ensuite, qu’en application de l’article L311-6 de ce code, ne sont communicables qu’aux personnes intéressées, les documents administratifs : « 1° Dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée (…) ». L'intéressé, au sens de cet article, est la personne directement concernée par le document, c'est-à-dire, s'agissant d'un document contenant des informations qui se rapportent à une personne, soit cette personne elle-même, soit un ayant droit direct de cette personne, titulaire d'un droit dont il peut se prévaloir à raison du document dont il demande la communication (CE, 17 avril 2013, n° 337194, mentionnée aux tables du recueil Lebon). La commission indique, par ailleurs, que la personne intéressée, dès lors qu'elle est majeure et capable, a la possibilité d'accéder aux documents et informations la concernant en recourant, dans les conditions de droit commun, à un mandataire. Il convient pour l'administration de s'assurer de l'identité du mandant, de l'existence du mandat exprès à cette fin et de sa régularité, sauf s'agissant de ce dernier point, dans le cas des avocats qui, par exception, en raison de leur qualité d'avocat, n'ont pas à justifier d'un mandat écrit.

La commission estime que les documents relatifs à l’attribution d’une chambre particulière ne font pas apparaître, en eux-mêmes, le comportement des patients concernés dans des conditions susceptibles de leur porter préjudice, ni ne portent une appréciation ou un jugement de valeur sur ces derniers. Ces documents, en tant qu’ils révèlent le choix des patients quant aux caractéristiques de leur hospitalisation, comportent en revanche des mentions couvertes par le secret de la vie privée des intéressés. Elle déduit de ce qui précède que ces pièces ne sont, en principe, communicables qu’aux seuls intéressés ou à des tiers mandatés.

Elle observe, cependant, que le coût des chambres individuelles peut être pris en charge, en tout ou partie, par les organismes mutualistes au titre des différents contrats qui les lient à leurs adhérents. Des conventions permettent aux établissements publics de santé de facturer le coût de ces prestations aux mutuelles.

En l’espèce, la commission comprend des éléments d’information portés à sa connaissance qu’au titre de la période comprise entre 2016 et 2021, le centre hospitalier d’Arcachon a facturé à la mutuelle X, des coûts de prestations de chambre particulière pour plus de 3000 patients adhérents.

Elle relève que les documents demandés sont de nature à permettre à la mutuelle X de vérifier le bien-fondé des sommes ainsi mises à sa charge, en s’assurant que ses adhérents ont effectivement sollicité le bénéfice d’un tel régime spécial. Ils présentent un lien direct avec le bien-fondé de la créance que détient le centre hospitalier d’Arcachon à l’égard de cet organisme mutualiste. Dans les circonstances particulières de l’espèce, la commission estime que la mutuelle X doit être regardée comme étant intéressée par l’objet et le contenu des formulaires de demandes de chambres particulières correspondants, dès lors qu’il s’agit des justificatifs des prestations qui lui ont été facturées par le centre hospitalier d’Arcachon, la concernant directement.

La commission vous invite, dès lors, à transmettre ces justificatifs à la mutuelle X, à condition, toutefois, qu’ils se bornent à attester de la volonté des patients concernés d’être placés en chambre individuelle et qu’ils ne comportent aucune indication médicale.

Enfin, dans les circonstances particulières de l’espèce, la commission estime que la demande qui vous est présentée ne revêt pas un caractère abusif.