Avis 20223341 - Séance du 07/07/2022

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Avis 20223341 - Séance du 07/07/2022

Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP)

Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 4 avril 2022, à la suite du refus opposé par le directeur général de l'assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) à sa demande de communication, à la suite d'une précédente transmission incomplète, de l'intégralité du dossier médical de sa mère, Madame X, relatif à son hospitalisation à l'hôpital Bichat du X, afin de connaître les causes de sa mort et de faire valoir ses droits, sur le fondement de l'article L1110-4 du code de la santé publique.

En l’absence de réponse du directeur général de l'AP-HP, la commission rappelle que, conformément aux dispositions combinées des articles L342-1 et R311-12 du code des relations entre le public et l’administration, elle ne peut être saisie par une personne qu’en cas de refus opposé par une autorité administrative à une demande de communication d'un document administratif. Aux termes de l'article L311-14 du code des relations entre le public et l’administration, « toute décision de refus d'accès aux documents administratifs est notifiée au demandeur sous la forme d'une décision écrite motivée comportant l'indication des voies et délais de recours » et aux termes des articles R311-15 et R343-1 du même code, l'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus ou de l'expiration du délai d'un mois à compter de la réception de la demande par l'administration compétente, pour saisir la commission.

Elle souligne également, d'une part, que le non-respect du délai de deux mois de saisine de la commission a pour conséquence l’irrecevabilité de cette saisine ainsi que celle d’un éventuel recours contentieux ultérieur (CE, sect., 25 juillet 1986, n° 34278) et, d'autre part, que ce délai se décompte comme en matière contentieuse, soit deux mois à compter de la date de notification effective de la décision de refus si elle comporte la mention de la possibilité de saisir la commission et du délai de saisine, soit trois mois à compter de l'accusé de réception de la demande de communication par l'administration, sous réserve que cet accusé de réception comporte les mêmes indications.

Elle note en revanche que le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code des relations entre le public et l’administration.

Elle rappelle que, par une décision du 31 mars 2017 (n° 389842), le Conseil d’Etat a néanmoins précisé que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans le cas où le recours juridictionnel doit obligatoirement être précédé d'un recours administratif, celui-ci doit être exercé, comme doit l'être le recours juridictionnel, dans un délai raisonnable.

La commission estime que, dans le cas où la notification d’un refus de communication de document administratif ne comporte pas la mention des voies et délais de recours ou si la preuve de la notification de ce refus n’est pas établie, le recours administratif préalable dont elle a la charge doit néanmoins être exercé par le demandeur dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle ce refus lui a été notifié ou de celle à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance. Sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le demandeur, ce délai ne peut excéder un an.

La commission relève des éléments portés à sa connaissance que, par courrier du 15 mars 2018, Madame X a sollicité de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris la communication du dossier médical de sa mère décédée, Madame X. Par courrier du 20 mars 2018, l’administration a transmis à Madame X les seuls documents permettant, selon elle, de connaître les causes de la mort. Par courrier du 10 avril 2018, Maître X, représentant Madame X, a réitéré sa demande en vue de la communication d’éléments supplémentaires.

La commission estime que le courrier du 20 mars 2018, produit par l’intéressée à l’appui de sa saisine et donc nécessairement réceptionné par elle, doit être regardé comme ayant été reçu, en l’absence d’élément contraire avancé par Madame X, le 27 mars suivant, compte tenu des délais d’acheminement du courrier en France métropolitaine ou, au plus tard, le 10 avril, date de son courrier de réponse.

La commission constate, par suite, que Madame X a été informée du refus de faire droit à sa demande de communication intégrale du dossier médical de sa mère, à cette date du 27 mars 2018 ou, au plus tard, le 10 avril. Elle relève que ce courrier, alors même qu’il ne fait pas pleinement droit à la demande, ne comporte pas la mention des voies et délais de recours.

Dans ces conditions, elle estime que sa saisine datée du 4 avril 2022, présentée plus de deux ans après, soit au-delà du délai raisonnable susmentionné, est, en l’absence de circonstances particulières avancées par Madame X, tardive.

Elle ne peut donc que déclarer irrecevable la demande.

La commission rappelle enfin, à toutes fins utiles, que le dernier alinéa de l'article L1110-4 du code de la santé publique, auquel renvoie l'article L1111-7 du même code, prévoit que le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations médicales concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire opposée par la personne avant son décès. Ces dispositions n'instaurent donc au profit des ayants droit d'une personne décédée qu'un droit d'accès limité à certaines informations médicales, et non à l’entier dossier médical. Il appartient à l’équipe médicale ayant assuré la prise en charge du patient de sélectionner les documents susceptibles de répondre aux objectifs poursuivis par le demandeur.

Il est donc loisible à Madame X de réitérer auprès de l’établissement sa demande initiale fondée sur la recherche des causes de la mort de sa mère, si elle estime que celle-ci n’a pas été pleinement satisfaite, ou d’effectuer une nouvelle demande, fondée sur l’un des deux autres objectifs mentionnés à l’article L1110-4 du code de la santé publique.