Avis 20226034 - Séance du 03/11/2022

Avis 20226034 - Séance du 03/11/2022

Mairie de Cernay (86)

Monsieur X, pour X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 30 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Cernay à sa demande de communication, par courrier électronique, des documents, lettres et courriers électroniques relatifs au projet de parc industriel éolien sur le territoire de la commune, échangés entre le promoteur éolien X, les parties intéressées, les propriétaires et toute autre personne concernée par le projet, et le maire ou tout autre représentant de la commune, y compris ceux échangés avec le maire sur sa messagerie privée ou SMS.

La Commission, qui a pris connaissance de la réponse du maire de Cernay, rappelle, en premier lieu, qu'il résulte de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration que « sont considérés comme des documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission ». Elle considère que tout ensemble cohérent d’informations, quels que soient sa forme et son support, répond à la définition d’un document administratif au sens de ces dispositions. Constituent notamment de tels documents les correspondances ainsi que les minimessages textes (SMS) et les courriers électroniques émanant des autorités administratives ou de leurs services.

La Commission souligne que la circonstance qu'un message électronique ou un SMS soit émis ou reçu sur une adresse de messagerie ou un téléphone personnels privés ne permet pas, par elle-même, de le soustraire au droit d'accès aux documents administratifs régi par le livre III du code des relations entre le public et l'administration. Elle considère, en effet, que ces messages, dès lors qu'ils sont produits ou reçus dans le cadre des missions de service public exercées et des compétences détenues à ce titre, constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicables sur le fondement de ce code (avis n° 20210990 du 25 mars 2021).

La Commission précise, en second lieu, que dans sa décision du 3 juin 2022, n° 452218, le Conseil d’État a jugé que seules les correspondances émises ou reçues, dans le cadre des fonctions exercées au nom de la commune, par le maire, ses adjoints ou les membres du conseil municipal auxquels le maire a délégué une partie de ses fonctions, ont le caractère de documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. Tel n’est en revanche pas le cas des correspondances des élus locaux qui ne peuvent être regardées comme émanant de la commune dès lors qu’elles expriment, notamment, des positions personnelles ou des positions prises dans le cadre du libre exercice de leur mandat électif.

La Commission en déduit que les documents produits par l’exécutif d’une commune revêtent un caractère administratif, dès lors que ces autorités sont réputées agir au nom de cette collectivité. L’utilisation d’une messagerie ou d’un téléphone personnel privé est, à cet égard, sans incidence, à condition que les échanges concernés ne soient pas détachables de ces fonctions. Les documents produits ou reçus par le conseil municipal constituent également des documents administratifs, dès lors que les élus délibèrent, à cette occasion, au nom de la commune. En revanche, échappent à la qualification de document administratif les messages des élus, y compris des membres de l’exécutif local, qui ne sont pas échangés au nom de la commune dans le cadre d’une fonction élective, mais qui le sont à titre personnel dans le cadre de leur fonction politique. Le caractère administratif ou politique des messages émanant des élus locaux s’apprécie ainsi, au cas par cas, notamment à partir d’un critère matériel, tenant à leur contenu et à leur objet, le critère organique et le critère formel constituant, pour leur part, de simples indices.
En l’espèce, la Commission relève que la demande vise des documents relatifs à un projet de parc éolien, échangés par le maire ou tout autre représentant de la commune. Ces autorités étant réputées agir au nom de la commune, la Commission en déduit que les documents demandés revêtent un caractère administratif, y compris ceux qui ont été échangés par le maire, en cette qualité, depuis sa messagerie ou son téléphone personnel privé.
Elle rappelle que les informations relatives à un projet d'installation d'un parc d'éoliennes, notamment les décisions conditionnant sa réalisation, constituent des informations relatives à l'environnement, au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement, eu égard aux incidences que de telles installations sont susceptibles de comporter pour des éléments tels que les paysages et les sites naturels, mentionnés au 1° du même article, ou, le cas échéant, au voisinage de ces installations, pour les conditions de vie des personnes, mentionnées au 3° de cet article. Aucune disposition du chapitre IV du titre II du livre Ier de ce code ne prévoit, par ailleurs, la possibilité de refuser l'accès aux documents qui s'inscrivent dans un processus préparatoire à l'adoption d'un acte qui n'est pas encore intervenu, dès lors que ces documents sont eux-mêmes achevés (cf. avis n° 20054612 du 24 novembre 2005 et n° 20060930 du 16 mars 2006).

Par conséquent, la Commission considère que les documents que détient l’administration et qui sont relatifs à un projet de création d'un parc éolien sont communicables, à tout moment, à toute personne qui en fait la demande, sous la seule réserve des motifs légaux de refus de communication énumérés à l'article L124-4 du code de l'environnement ou, en ce qui concerne les émissions dans l'environnement, telles que les émissions sonores, infrasonores ou lumineuses ou encore les champs électriques ou magnétiques, au II de l'article L124-5 de ce code.

A cet égard, la Commission rappelle que si les dispositions des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, auxquelles renvoie l’article L124-4 du code de l’environnement, ne permettent pas la communication de documents lorsque celle-ci porterait notamment atteinte au secret des affaires, il en va autrement lorsque les documents sollicités comportent des informations relatives à des émissions dans l’environnement. Dans ce cas, une demande de communication ne peut être rejetée que pour les motifs suivants : atteinte aux relations internationales, à la sécurité publique ou à la défense nationale, atteinte au déroulement des procédures juridictionnelles et à la recherche des infractions pouvant donner lieu à des sanctions pénales et atteinte à des droits de propriété intellectuelle.

En application de ces principes, la Commission estime que les documents sollicités sont librement communicables à toute personne sur le fondement des dispositions des articles L311-1 du code des relations entre le public et l’administration et L124-1 et suivants du code de l’environnement, à condition qu’ils soient achevés et sous réserve de l'occultation préalable des éventuelles mentions relevant d'un secret protégé par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l’administration. Elle émet donc, sous ces réserves, un avis favorable à la demande.