Avis 20227828 - Séance du 26/01/2023

Avis 20227828 - Séance du 26/01/2023

Tribunal judiciaire de Lons-le-Saunier

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 14 novembre 2022, à la suite du refus opposé par la présidente du tribunal judiciaire de Lons-le-Saunier à sa demande de communication d'un état faisant ressortir les affaires qu’il a traitées dans le cadre de la permanence pénale X et les honoraires correspondants.

En l'absence de réponse de la présidente du tribunal judiciaire de Lons-le-Saunier à la clôture de sa séance, la commission comprend que le demandeur, alors avocat, a été désigné d’office soit par le bâtonnier, soit par le président de la juridiction en vue d’assurer la défense de justiciables devant le tribunal correctionnel dans le cadre des permanences en matière pénale organisées par le barreau.

En premier lieu, la commission rappelle que le Conseil d’État a jugé (CE, Section, 7 mai 2010, n°303168) que constituent des documents juridictionnels les documents, quelle que soit leur nature, qui sont détenus par les juridictions et qui se rattachent à la fonction de juger dont elles sont investies.

La commission s’estime par suite incompétente pour se prononcer sur la demande en tant qu’elle porte sur les frais de justice dont une décision juridictionnelle aurait alloué le bénéfice à l’avocat, qui se rattachent à la fonction de juger du tribunal correctionnel.

La commission n’est pas davantage compétente pour se prononcer sur la demande en tant qu’elle porte sur les honoraires qui seraient dus à l’avocat par les clients qu’il a défendus, dans le cadre de rapports contractuels de droit privé.

En second lieu, la commission estime en revanche que le document recensant les affaires dans lesquelles Monsieur X a été désigné d’office est détachable de la fonction de juger du tribunal. Elle considère qu’il constitue un document administratif au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration et qu’il est communicable au demandeur, qui dispose de la qualité de personne intéressée au sens de l'article L311-6 du même code.

La commission rappelle toutefois que le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, Ministre d'État, Ministre de l’éducation nationale, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, Association de défense des animaux victimes d'ignominie ou de désaffection, n° 152393).

En revanche, la commission considère de manière constante que sont des documents administratifs existants au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, ceux qui sont susceptibles d’être obtenus par un traitement automatisé d’usage courant. Il résulte en effet de la décision du Conseil d’État du 13 novembre 2020, n° 432832, publié aux Tables, que constituent des documents administratifs, au sens de ces dispositions, les documents qui peuvent être établis par extraction des bases de données dont l’administration dispose, si cela ne fait pas peser sur elle une charge de travail déraisonnable, laquelle doit être interprétée de façon objective.

La commission précise, à ce titre, que les informations demandées doivent pouvoir être obtenues par un traitement automatisé de données, sans retraitements successifs, en particulier par des interventions manuelles. Elle estime également que, lorsque les informations sollicitées doivent, pour être extraites d'un fichier informatique, faire l'objet de requêtes informatiques complexes ou d'une succession de requêtes particulières qui diffèrent de l'usage courant pour lequel le fichier informatique dans lequel elles sont contenues a été créé, l'ensemble des informations sollicitées ne peut alors être regardé comme constituant un document administratif existant (avis n° 20222817, 20222850 et 20222936 du 23 juin 2022). Une demande portant sur la communication d'un tel ensemble d'informations doit dès lors être regardée comme tendant à la constitution d'un nouveau document (conseil n° 20133264 du 10 octobre 2013) et, par suite, être déclarée irrecevable.

La commission émet dès lors, en application de ces principes, un avis favorable sur ce point de la demande, sous réserve que le document existe ou puisse être obtenu par un traitement automatisé d’usage courant.

Enfin, dans l’hypothèse où le tribunal judiciaire ne détiendrait pas un tel document, la commission rappelle qu’il lui appartiendrait, en application du sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, de transmettre la demande de communication, accompagnée du présent avis, à la personne de droit privé chargée d’une mission de service public susceptible de le détenir, en l’espèce l’ordre des avocats concerné, et d’en aviser Monsieur X.