Avis 20230252 - Séance du 09/03/2023

Avis 20230252 - Séance du 09/03/2023

Ministère de la santé et de la prévention

Monsieur XX, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 12 janvier 2023, à la suite du refus opposé par le ministre de la santé et de la prévention à sa demande de copie et de publication en ligne d'un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) réalisé à l’été 2020 sur Santé publique France.

En réponse à la demande qui lui a été adressée, le ministre de la santé et de la prévention a informé la commission que le rapport de l’IGAS sollicité avait été remis à la commission d’instruction de la Cour de justice de la République et qu’il estimait que sa communication serait de nature à porter atteinte au déroulement de la procédure engagée devant cette juridiction.

La commission rappelle, en premier lieu, qu’un rapport d’enquête ou un audit réalisé par ou à la demande de l'autorité responsable d'un service public est un document administratif au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, communicable à toute personne qui en fait la demande en vertu de l'article L311-1 de ce code, à la condition qu’il ne revête pas ou plus un caractère préparatoire et sous réserve des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6. La circonstance qu’un exemplaire d’un tel rapport établi par une autorité administrative ait été transmis à l’autorité judiciaire ne suffit pas à lui faire perdre son caractère de document administratif.

En l’espèce, la commission observe que le rapport de l’IGAS, qui a été élaboré dans le cadre d’une mission administrative d’inspection et non à l’intention ou à la demande de l’autorité judiciaire, revêt un caractère administratif.

La commission rappelle, en second lieu, qu’aux termes du f) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte « au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d’opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l’autorité compétente ».

Elle souligne que la seule circonstance qu'un document administratif se rapporte à une procédure en cours devant une juridiction de l'ordre judiciaire ou administratif ne saurait par elle-même faire obstacle à sa communication sur le fondement du droit d'accès aux documents administratifs, et ce même s’il a été transmis à l’autorité judiciaire et coté au dossier d’instruction du juge pénal (CE, 5 mai 2008, n° 309518) et même si la communication du document serait de nature à affecter les intérêts d'une partie à la procédure (CE, 16 avril 2012, n° 320571), qu'il s'agisse d'une personne publique ou de toute autre personne. Ce n’est, en effet, que dans l’hypothèse où cette communication risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives de l'autorité judiciaire ou de la juridiction que la communication d'un document administratif peut être refusée en application du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration. Tel peut être le cas lorsque la communication est de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, entrave ou complique l'office du juge ou encore retarde le jugement d'une affaire (conseil n° 20092608 du 18 juillet 2009). Lorsqu’un document administratif a été transmis à l’autorité judiciaire, il appartient à l’autorité saisie d’une demande de communication de ce document de rechercher, à la date à laquelle elle se prononce, les suites données à cette transmission ou susceptibles de l’être, afin de déterminer, à moins que l’autorité judiciaire compétente ait donné son accord, si la communication du document sollicité est de nature à porter atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles ou d’opérations préliminaires à de telles procédures en empiétant sur les prérogatives de cette autorité (CE, 30 décembre 2015, n° 372230 et CE, 21 octobre 2016, n° 380504).

La commission souligne que la circonstance que le rapport de l’IGAS sollicité soit en l’espèce couvert par le secret de l’instruction en vertu de l’article 11 du code de procédure pénale ne justifie pas légalement, par elle-même, un refus de communication sur le fondement de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration.

Toutefois, la commission, qui prend note de la réponse défavorable de la présidente de la Commission d'instruction de la Cour de justice de la République, considère en l’état des informations portées à sa connaissance que le risque que la communication, à ce stade, du rapport interfère avec la procédure juridictionnelle en cours présente un caractère suffisant de vraisemblance. Elle estime ainsi que la communication du document sollicité serait de nature à faire craindre une atteinte au déroulement d’une procédure juridictionnelle au sens du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration.

Elle émet en conséquence un avis défavorable à la demande.