Avis 20230471 - Séance du 09/03/2023

Avis 20230471 - Séance du 09/03/2023

Préfecture du Val-d'Oise

Maître X, conseil de Monsieur X, en sa qualité de maire de la commune de Bonneuil-en-France, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 24 janvier 2023, à la suite du refus opposé par le préfet du Val-d'Oise à sa demande de copie, par courrier électronique, wetransfer ou tout autre lien, des documents suivants :
1) tout acte administratif/arrêté par lequel le préfet du Val-d'Oise aurait imposé à la commune de Bonneuil-en-France l'adhésion à la communauté d'agglomération Val-de-France à compter du 1er janvier 2014 ;
2) tout acte administratif/arrêté portant remplacement, à compter du 1er janvier 2016, de cette structure par la communauté d'agglomération Roissy Pays de France (qui comprendrait 42 communes dont celle de Bonneuil-en-France) ;
3) tous les marchés publics conclus entre le 1er janvier 2014 et le 31 décembre 2020, ayant trait à des travaux ou prestations réalisés sur le territoire de la commune de Bonneuil­-en-France et/ou pour le compte de cette commune et qui auraient été soumis au contrôle de légalité de la préfecture.

S’agissant des points 1) et 2) :

En réponse à la demande qui lui a été adressée, le préfet du Val-d'Oise a informé la commission que les documents mentionnés aux points 1) et 2) ont été communiqués à Maître X par courriel du 8 mars 2023, dont il a joint une copie. La commission en prend note et déclare, par suite, la demande d’avis sans objet dans cette mesure.

S’agissant du point 3) :

1. Sur la recevabilité de la demande

La commission rappelle que le droit d'accès aux documents administratifs défini par le livre III de ce code ne contraint pas l'administration à effectuer des recherches pour répondre à une demande et que les administrations ne sont pas tenues de répondre aux demandes trop générales ou insuffisamment précises (CE 27 septembre 1985, Ordre des avocats au barreau de Lyon c/ X, n° 56543, Lebon 267 ; CE 30 juin 1989, OPHLM de la Ville de Paris, n° 83477).

Elle estime ainsi irrecevables les demandes portant sur des échanges intervenus entre une ou des administrations et une autre administration ou une personne privée, lorsqu’elles sont trop imprécises quant à l'objet des documents demandés (avis n° 20216781 du 16 décembre 2021), quant à leur nature (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à l'administration et/ou ses composantes en cause (avis n° 20195507 du 12 mars 2020), quant à son ou ses interlocuteurs (avis n° 20194880 du 12 mars 2020 ; n° 20213868 du 15 juin 2021), quant au cadre d'élaboration du document (avis n° 20213868 du 15 juin 2021) ou encore quant à la période de temps visée (avis n° 20213868 du 15 juin 2021).

La commission relève, en l’espèce, que la demande vise tous les marchés publics ayant trait à des travaux ou prestations réalisés sur le territoire de la commune de Bonneuil­-en-France et/ou conclus pour son compte, sur une période de six ans, sans précision quant à l’identité des parties contractantes, à l’objet des contrats ou à leur date de signature. Elle estime cependant que la taille de cette commune ainsi que le périmètre de la demande, qui n’inclut que les contrats transmis au contrôle de légalité, c’est-à-dire pour l’essentiel ceux dont le montant est supérieur à un certain seuil, permettent de circonscrire les documents sollicités. Elle observe en outre qu’en réponse à la demande qui lui a été adressée, le préfet du Val d’Oise n’a pas indiqué ne pas être en mesure d’identifier les marchés publics sollicités. Elle considère, par suite, que cette demande est suffisamment précise.

2. Sur la communication des documents sollicités

En premier lieu, la commission rappelle que selon le I de l'article 1er de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique : « Sous réserve des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration (…), les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 dudit code sont tenues de communiquer, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les documents administratifs qu'elles détiennent aux autres administrations mentionnées au même premier alinéa de l'article L300-2 qui en font la demande pour l'accomplissement de leurs missions de service public. / Les informations figurant dans des documents administratifs communiqués ou publiés peuvent être utilisées par toute administration mentionnée audit premier alinéa de l'article L300-2 qui le souhaite à des fins d'accomplissement de missions de service public autres que celle pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus ».

La commission précise, d’autre part, que les communes ont vocation à gérer, par leurs délibérations, l'ensemble des éléments affectant la vie de la collectivité dans le cadre des missions de service public les plus larges qui leur ont été dévolues par une clause générale de compétence. Ce n'est que dans l'hypothèse, résiduelle, où l'intervention de la commune s'exercerait en dehors de tout intérêt public qu'elle ne peut pas être regardée comme sollicitant auprès d'une administration publique la communication de documents pour l'accomplissement de ses missions de service public au sens de l'article 1er précité.

En l'espèce, la commission relève que la demande est motivée par la volonté du maire de Bonneuil-en-France d’obtenir les marchés publics en lien avec le territoire de sa commune conclus au cours du précédent mandat, qui n’ont pas pu être retrouvés dans les archives municipales. Ces documents seraient déterminants pour établir la matérialité d’infractions commises au préjudice de la commune et qui ont été signalées au procureur de la République, conformément aux dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale. La commission considère, eu égard à leur nature, au contexte et aux motifs de cette demande, que ces documents doivent donc être regardés comme demandés par la commune de Bonneuil-en-France pour l'accomplissement de ses missions de service public.

En second lieu, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration.

Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code. Sont notamment visées par cette réserve, les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics.

En l’espèce, la commission considère que la commune de Bonneuil-en-France présente la qualité de personne intéressée par les marchés publics qu’elle a signés. Elle estime par suite, que ces contrats lui sont intégralement communicables. Les contrats qui ont été signés par un tiers ne pourront en revanche lui être adressés qu’après occultation des mentions protégées par le secret des affaires.

La commission émet, sous ces réserves, un avis favorable à la demande.

Elle rappelle enfin, à toutes fins utiles, que dans le cas de demandes de communication portant sur un volume important de documents, l’administration est fondée à aménager les modalités de communication et éventuellement convenir avec le demandeur d’un échéancier de communication, afin que l’exercice du droit d’accès reste compatible avec le bon fonctionnement de ses services.