Avis 20231483 - Séance du 11/05/2023

Avis 20231483 - Séance du 11/05/2023

Ecole d’économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse ‐ TSE

Monsieur XX, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 mars 2023, à la suite du refus opposé par le directeur de l’École d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse – TSE à sa demande de communication des documents suivants :
1) l'objet et le montant des prestations de sous-traitance de la Toulouse School of Economics (TSE) à Accenture et McKinsey ;
2) les contributions de TSE à Accenture et McKinsey dans le cadre de sa sous-traitance.

En réponse à la demande qui lui a été adressée, le directeur de l’École d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse – TSE a informé la commission qu'il n'était pas en possession de ces documents, qui concernent des activités qui ne sont pas réalisées au sein de l'école mais au sein de la « Fondation de coopération scientifique Jean-Jacques Laffont – TSE ».

La commission rappelle, d'une part, qu'aux termes de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration : « Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission (...) ». L’article L311-2 du même code prévoit par ailleurs que lorsqu'une administration mentionnée à l'article L300-2 est saisie d'une demande de communication portant sur un document administratif qu'elle ne détient pas mais qui est détenu par une autre administration mentionnée au même article, elle la transmet à cette dernière et en avise l'intéressé.

La commission rappelle, d'autre part, que le Conseil d'État a jugé, dans sa décision de section « Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés (APREI) » du 22 février 2007, n° 264541, « qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l’inverse, exclure l’existence d’un service public, une personne privée qui assure une mission d’intérêt général sous le contrôle de l’administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l’exécution d’un service public. Toutefois, même en l’absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l’intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu’aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l’administration a entendu lui confier une telle mission ».

La commission en déduit que lorsqu'une personne morale de droit privé est chargée d'une mission de service public, les documents qu'elle élabore ou détient ne constituent des documents administratifs au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration que s’ils présentent un lien suffisamment direct avec l’accomplissement de cette mission.

En l'espèce, la commission observe, en premier lieu, que la Fondation Jean-Jacques Laffont est une fondation de coopération scientifique, relevant des dispositions de l'article L344-11 du code de la recherche selon lesquelles : « Plusieurs établissements ou organismes publics ou privés, parmi lesquels au moins un établissement public de recherche ou d'enseignement supérieur, peuvent constituer une fondation de coopération scientifique dans l'objectif de conduire, selon leur composition, une ou des activités mentionnées aux articles L112-1 du présent code et L123-3 du code de l'éducation. Une communauté d'universités et établissements mentionnée à l'article L711-2 du code de l'éducation peut constituer une fondation de coopération scientifique seule. D'autres partenaires, en particulier des entreprises, des collectivités territoriales et des associations, peuvent être associés à la fondation. / Les fondations de coopération scientifique sont des personnes morales de droit privé à but non lucratif soumises aux règles relatives aux fondations reconnues d'utilité publique dans les conditions fixées notamment par la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat (...) ».

Aux termes de ses statuts modifiés, qui ont été approuvés en dernier lieu par un décret du 18 juin 2021, la fondation a pour objet de conduire un projet d'excellence scientifique dans le domaine de l'économie et de soutenir des projets dans lesquels les liens avec l'analyse économique sont forts, en particulier des projets de recherche pluridisciplinaire. Il ressort de ces statuts et des informations figurant sur le site internet de l’École d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse que la Fondation Jean-Jacques Laffont a été créée dans le cadre d’un appel à projet de l’État, entre ce dernier, l'Université de Toulouse 1, le CNRS, l'INRA et l’EHESS. Ces fondateurs publics, qui lui ont apporté sa dotation initiale, siègent à son conseil d’administration.

L’article 4 de ses statuts prévoit en outre que le recteur de région académique Occitanie, chancelier des universités, est commissaire du Gouvernement auprès de la fondation et qu’à ce titre, il assiste aux séances du conseil avec voix consultative, veille au respect des statuts, à la régularité des décisions, à leur conformité avec l'objet de la fondation, ainsi qu'à sa bonne gestion. Lorsqu’une délibération lui paraît contraire à l’un de ces principes ou de nature à compromettre le bon fonctionnement de la fondation, il peut demander une nouvelle délibération du conseil d’administration. En vertu de l’article 17 des statuts, le budget, le rapport, les comptes annuels et la liste des unités de recherche soutenues par la fondation doivent par ailleurs être adressés au ministre du budget et au ministre de la recherche, ce dernier ayant un droit de visite et un droit de se faire rendre compte.

La commission relève enfin et au surplus que le décret n° 2022-1535 du 8 décembre 2022 relatif à l'Ecole d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse – TSE dispose que le président de la fondation siège au conseil d’administration de l’école, qu’il préside le conseil de la recherche de cet établissement et que pour l’exercice de leurs missions, ces instances doivent prendre en compte « les orientations, les avis et recommandations de la Fondation de coopération scientifique Jean-Jacques Laffont, Toulouse sciences économiques, relatifs aux activités de formation et de recherche dans les domaines des sciences économiques et des sciences humaines et sociales ».

Compte tenu de ses missions, de ses conditions de création et de fonctionnement ainsi que de ses ressources, la commission estime ainsi que la Fondation Jean-Jacques Laffont doit être regardée comme chargée d’une mission de service public. Par conséquent, les documents qu’elle produit ou reçoit pour l’accomplissement de cette mission sont des documents administratifs soumis au droit d'accès prévu aux articles L300-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration.

En deuxième lieu, la commission souligne qu’en dépit de sa demande, l’École d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse ne lui a pas apporté de précisions sur la nature exacte et le contexte des activités réalisées en lien avec les sociétés Accenture et McKinsey. La commission précise à cet égard que si ces activités ne présentaient pas de lien suffisamment direct avec les missions de service public de la Fondation Jean-Jacques Laffont, elle ne pourrait que se déclarer incompétente pour statuer sur la présente demande.

En l’état des informations dont elle dispose, la commission émet par suite un avis favorable à la communication des documents sollicités s’ils ont trait aux missions de service public de la fondation, sous réserve de l’occultation préalable, le cas échéant, des mentions relevant d’un secret protégé par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration.

Enfin, la commission souligne qu'il appartient à l’École d'économie et de sciences sociales quantitatives de Toulouse en application du sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, de transmettre la demande de communication, accompagnée du présent avis, à la Fondation Jean-Jacques Laffont susceptible de détenir les documents demandés, et d’en aviser le demandeur.