Conseil 20235139 - Séance du 21/09/2023

Conseil 20235139 - Séance du 21/09/2023

Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL)

La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 21 septembre 2023 votre demande de conseil relative au caractère communicable des rapports présentés en séance plénière au collège par l’un de ses membres, en dehors des procédures de formalités préalables prévues par le chapitre IV de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, au regard du secret des délibérations de la CNIL.

A titre liminaire, la commission observe que votre demande de conseil ne porte pas sur les rapports présentés dans le cadre des formalités préalables à la mise en œuvre des traitements prévues par le chapitre IV de la loi du 6 janvier 1978, qui font l’objet d’un régime particulier de communication sur l’application duquel la CADA n’a pas reçu compétence (avis de partie II n° 20223598 du 3 novembre 2022), ni davantage sur les rapports présentés à la formation restreinte de la CNIL pour la mise en œuvre des pouvoirs de sanctions énumérés aux articles 20 à 23 de la loi du 6 janvier 1978, sur la communicabilité desquels la CADA s’est déjà prononcée (avis de partie II n° 20190505 du 21 mars 2019).

Pour ce qui concerne les rapports présentés en séance plénière sur lesquels vous l’interrogez, la commission souligne qu’ils constituent des documents produits ou reçus par la CNIL dans le cadre de ses missions de service public définies à l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978 et revêtent le caractère de documents administratifs soumis au régime de droit commun d’accès aux documents administratifs prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration.

La commission relève qu’en vertu du règlement intérieur de la CNIL, les délibérations, à l’exception de celles portant élection, sont prises sur le fondement d’un projet de délibération et, le cas échéant, d’un rapport, transmis à l’ensemble des membres de la commission et au commissaire du Gouvernement. Le ou les rapporteurs sont désignés parmi les dix-huit membres composant la commission. Le règlement intérieur précise en outre que cette dernière peut également être saisie de toute question entrant dans son champ de compétence, qui lui est alors soumise sous la forme d’un rapport en séance plénière ne donnant pas lieu à délibération.

La commission vous rappelle ensuite que le h) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte à un secret protégé par la loi. Elle précise que seuls les secrets bénéficiant dans la hiérarchie des normes d’un régime de protection fixé par une loi ou par des textes ou principes de valeur supérieure entrent dans le champ de cette réserve.

La commission estime que revêt un tel caractère le secret des délibérations des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, mentionné à l’article 9 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes. Ce secret, qui est opposable aux autorités dont la liste est annexée à cette loi telles la CNIL, a pour objet de faire obstacle à la diffusion publique des prises de position formulées par les membres des collèges lors de l'examen des affaires qui leur sont soumises.

En revanche, la commission considère que la communication des documents sur la base desquels une autorité administrative indépendante a pris une décision ne porte pas nécessairement atteinte au secret de ses délibérations (s’agissant du CSA, avis de partie II n° 20143014 du 16 octobre 2014 et avis n° 20175542 du 22 février 2018, et s'agissant de l'ARCEP, avis de partie II n° 20221692 du 21 avril 2022). Il n’en irait autrement que si ces documents, par leur teneur ou leur objet, s’avéraient indissociables des débats susceptibles de s'être tenus au sein de l’autorité concernée (avis de partie II n° 20156097 du 6 février 2016, s’agissant du CSA).

La commission vous indique par conséquent, en premier lieu, que les communications faites par les agents de la CNIL à sa formation plénière, dès lors que ces agents ne prennent pas part aux délibérations, ne relèvent en principe pas du secret des délibérations et constituent des documents communicables à toute personne qui en fait la demande en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Doit cependant être réservée l’hypothèse où ces communications s’avéreraient, compte tenu de leur teneur ou de leur objet, indissociables des débats susceptibles de s’être tenus entre les membres de la CNIL.

En deuxième lieu, les rapports présentés par le ou les rapporteurs désignés parmi les membres de la formation plénière, en tant qu’ils expriment la position personnelle de leurs auteurs, sont couverts par le secret des délibérations du collège. La commission souligne qu’il en va ainsi indépendamment de la circonstance que la question soumise à la formation plénière ait ou non effectivement donné lieu à un vote.

Toutefois, ainsi que vous le relevez, aux termes de l’article L311-7 du code des relations entre le public et l'administration, lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L311-5 et L311-6 du même code mais qu'il est possible d'occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions. L’administration n’est fondée à refuser la communication d'un document dans son entier que lorsque l’occultation partielle priverait ce document de son intelligibilité (CE, 25 mai 1990, Lebon T. 780) ou de son sens (CE, 4 janvier 1995, req. n° 117750), ou la communication de tout intérêt (CE, 26 mai 2014, req. n° 342339).

En l’espèce, après avoir pris connaissance du rapport présenté en séance plénière le 23 mars 2017 portant sur une demande de conseil concernant la collecte de données personnelles des habitants de « Smartseille », la commission estime que les passages en page 3 débutant par « Votre rapporteur ne partage pas cette analyse » et se terminant par « l’assemblée générale des copropriétaires », ceux en page 5 débutant par « n’appelle pas d’observations » et se terminant par « loi du 6 janvier 1978 modifiée », débutant par « S’agissant de la sécurisation » et se terminant par « édition du badge », débutant par « toutefois, la collecte de données » et se terminant par « demande de conseil », ceux en page 6 débutant par « Votre rapporteur ne partage pas » et se terminant par « ses données personnelles », débutant par « Votre rapporteur considère » et se terminant par « désactivation du dispositif », ceux en pages 6 et 7 débutant par « Votre rapporteur estime que » et se terminant par « désactivation individuelle », ainsi que ceux en page 7 débutant par « Votre rapporteur propose d’admettre » et se terminant par « l’un des copropriétaires » puis débutant par « Cependant » et se terminant par « limitation de durée », relèvent du secret des délibérations.

La commission considère que le reste du rapport ne comporte en revanche pas de mentions protégées au titre du secret des délibérations du collège de la CNIL, ni ne relevant d’un autre secret protégé par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration. En particulier, il n’est pas apparu à la commission, en l’état des informations dont elle dispose, que la communication du rapport serait susceptible de porter atteinte au secret des affaires du porteur du projet.

Enfin, la commission estime que les occultations des mentions protégées en application du h) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration ne sont en l’espèce pas de nature à priver le document de son sens ni la communication de tout intérêt.

Par conséquent, la commission vous invite à communiquer le rapport sollicité selon ces modalités.