Avis 20235675 - Séance du 02/11/2023

Avis 20235675 - Séance du 02/11/2023

Ministère de la Justice

Monsieur X, pour X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 septembre 2023, à la suite du refus opposé par le garde des sceaux, ministre de la justice à sa demande de communication, par courrier électronique, des documents suivants :
1) le communiqué de presse transmis au moment des réquisitions aux fins de non-lieu dans l'affaire X ;
2) toute éventuelle autre communication aux médias dans cette affaire.

En l’absence de réponse du garde des sceaux, ministre de la justice à la date de sa séance, la commission rappelle, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration : « Sont considérés comme documents administratifs, (...), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions ».

La commission précise que les documents produits ou reçus dans le cadre et pour les besoins d’une procédure juridictionnelle ne présentent pas un caractère administratif et n'entrent donc pas dans le champ d'application du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en va ainsi, notamment, des jugements, ordonnances, décisions ou arrêts rendus par les juridictions de l'ordre judiciaire ou administratif. C'est aussi le cas, plus largement, des décisions du parquet, des dossiers d'instruction, des procès-verbaux d'audition, des rapports d'expertise ou des mémoires et observations des parties – c'est-à-dire de l'ensemble des pièces de procédure proprement dites – mais aussi des documents de travail internes à une juridiction, destinés à leurs membres et concourant à l'instruction des affaires ou à la formation des jugements (CE, 28 avril 1993, n° 117480). Ainsi, les documents, quelle que soit leur nature, qui sont détenus par les juridictions et qui se rattachent à la fonction de juger dont elles sont investies n’ont pas le caractère de document administratif au sens du livre III du code des relations entre le public et l'administration (CE, 7 mai 2010, n° 303168).

En l’espèce, l’article 11 du code de procédure pénale prévoit, dans son dernier alinéa, qu’ « afin d'éviter la propagation d'informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l'ordre public ou lorsque tout autre impératif d'intérêt public le justifie, le procureur de la République peut, d'office et à la demande de la juridiction d'instruction ou des parties, directement ou par l'intermédiaire d'un officier de police judiciaire agissant avec son accord et sous son contrôle, rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause ».

La commission relève que si les communications prévues par ces dispositions sont en lien avec les instances dont les juridictions en cause sont saisies, elles sont toutefois produites dans le cadre spécifique de la fonction d’information du public du procureur de la République et donnent lieu à une large diffusion publique. La commission estime que la teneur et la portée de ces communications justifient, lorsqu’elles prennent une forme autre que strictement orale, qu’elles soient détachables de l’activité juridictionnelle et regardées comme des documents administratifs entrant dans le champ du droit d’accès prévu au livre III du code des relations entre le public et l’administration, pour lequel elle est compétente.

La commission considère que ces documents administratifs sont librement communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code précité.

En l’espèce, elle émet donc un avis favorable à la communication des documents sollicités, à condition qu’ils existent.