Avis 20235739 - Séance du 02/11/2023

Avis 20235739 - Séance du 02/11/2023

Office français de la Biodiversité (OFB)

Maître X, X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 21 septembre 2023, à la suite du refus opposé par le directeur général de l'Office français de la biodiversité à sa demande de communication des coordonnées GPS des stations d'androsaces du Dauphiné mentionnées dans un rapport de constat établi par l'Office français de la Biodiversité (OFB).

La commission considère, en premier lieu, que la présente demande, qui tend à la communication de données permettant la localisation d’une espèce floristique protégée, porte sur une information relative à l’environnement, au sens du 1°) de l’article L124-2 du code de l’environnement, en ce qu’elle a trait à la diversité biologique et à sa préservation.

La commission relève, en deuxième lieu, que cette demande est formée par une administration au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration. Elle rappelle, à cet égard, que l’article 1er de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique garantit au profit des administrations mentionnées au premier alinéa de l’article L300-2 un droit d’accès aux documents administratifs détenus par les autres administrations du même article, sous réserve des secrets protégés par les articles L311-5 et L311-6, lorsqu’elles en font la demande pour l’accomplissement de leurs missions de service public.
La commission relève, toutefois, que l'article L124-1 du code de l’environnement reconnaît le « droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues, reçues ou établies par les autorités publiques mentionnées à l'article L124-3 ou pour leur compte », qui « s'exerce dans les conditions définies par les dispositions du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du présent chapitre ».

La commission observe que la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, pour la transposition de laquelle les dispositions des articles L124-1 et suivants ont été introduites dans le code de l'environnement, garantit un droit d'accès aux informations relatives à l'environnement à tout « demandeur », défini comme « toute personne physique ou morale ». Cette directive n'exclut donc pas qu'une autorité administrative puisse avoir la qualité de demandeur et se prévaloir des dispositions nationales encadrant le droit d'accès à ces informations.
La commission déduit de ce qui précède que le droit d’accès des administrations aux informations environnementales n’est pas subordonné à la condition posée par l’article 1er de la loi du 7 octobre 2016 précitée mais s’exerce, comme pour tout demandeur, dans les conditions définies par le chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement (articles L124-1 à L124-8) et par les dispositions du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration, auquel l’article L124-1 renvoie.

La commission rappelle, en troisième lieu, que les articles L124-4 et L124-5 de ce code précisent les cas dans lesquels l'autorité publique peut rejeter une demande d'information relative à l'environnement. Le 2°) du I de l’article L124-4 du code de l’environnement, en particulier, indique que l’autorité publique peut rejeter une demande lorsque la consultation ou la communication d’une information relative à l’environnement pourrait porter atteinte à la protection de l’environnement auquel cette information se rapporte. Cette disposition doit être lue à la lumière de la directive du 28 janvier 2003 précitée qui dispose au paragraphe 2 de son article 4 que les États membres peuvent, notamment, prévoir qu'une demande d'informations environnementales peut être rejetée lorsque la divulgation des informations porterait atteinte à la protection de l’environnement auquel se rapportent ces informations, telle que la localisation d’espèces rares. Cette limite au droit d’accès aux informations environnementales doit être interprétée de manière restrictive, conformément à ce que prévoit ce même article, en mettant cette exigence en balance avec l’intérêt public que représente la divulgation des informations sollicitées. Ainsi, dans chaque cas particulier, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier l'intérêt d'une communication en procédant à une mise en balance entre l'intérêt public servi par la divulgation et l'intérêt servi par le refus de divulguer.

En l’espèce, la commission observe que les données GPS sollicitées permettent la localisation d’une plante, l’androsace du Dauphiné, découverte sur le glacier de la Girose dans la commune de La Grave, à proximité d’un projet d’implantation de téléphérique. Compte tenu de l’incidence prévisible de ces travaux sur l’environnement, elle estime que cette information revêt un intérêt pour l’information du public en matière environnementale.
La commission, qui a pris connaissance des observations du directeur général de l’OFB, relève toutefois, d’une part, l’intérêt scientifique et la forte valeur écologique liés à la découverte de cette plante, inventoriée en tant que nouvelle espèce vivante en 2021 et bénéficiant par ailleurs du statut d’espèce protégée au niveau national. Elle déduit, d’autre part, des éléments de contexte portés à sa connaissance que la communication des données sollicitées, en permettant la localisation précise de cette plante rare et protégée, représente en l’espèce un risque d’atteinte concrète et effective à sa préservation.

Au terme de la mise en balance des intérêts en présence, la commission estime que l'intérêt tenant à la sauvegarde de la diversité biologique et à la protection de l’androsace du Dauphiné est en l’espèce supérieur à l'intérêt, pour la protection de l'environnement, de la communication des informations sollicitées.

Elle émet, par suite, un avis défavorable à la demande.