Avis 20236722 - Séance du 14/12/2023

Avis 20236722 - Séance du 14/12/2023

Lycée professionel ISETA - Poisy

Monsieur X, pour le syndicat X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 8 novembre 2023, à la suite du refus opposé par le directeur général de l’institut des sciences de l’environnement et des territoires d’Annecy (ISETA-ECA), à sa demande de communication du fichier lié à la mise en œuvre du pacte enseignant et portant sur le dispositif indemnitaire instaurant une part fonctionnelle de l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves (ISOE), lequel comprend les éléments suivants :
1) la ventilation des moyens attribués par le ministère de l'agriculture en fonction des missions complémentaires arrêtées par le directeur ;
2) la liste des agents et la quotité attribuée à ceux-ci au regard des missions complémentaires arrêtées.

A titre liminaire, la commission rappelle qu’elle n’est pas compétente pour se prononcer sur le droit d’information que les représentants du personnel et les organisations syndicales peuvent tirer, en cette qualité, de textes particuliers. Ces derniers peuvent en revanche se prévaloir, comme tout administré, du droit d’accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l'administration, qui est ouvert à toute personne, indépendamment des fonctions exercées ou des mandats détenus.

La commission relève, ensuite, que les documents sollicités sont en lien avec la mise en œuvre du pacte enseignant au sein de l’ISETA-ECA, établissement d’enseignement agricole privé, lié par contrat avec l’État.

Elle rappelle que les établissements d’enseignement privés sous contrat avec l’État, que ce contrat soit simple ou d’association, sont des organismes privés chargés d’une mission de service public. La commission relève également qu’en vertu de l’article L813-8 du code rural et de la pêche maritime, les personnels enseignants et de documentation exerçant dans ces établissements « sont liés par un contrat de droit public à l’État, qui les rémunère directement ». La commission en déduit que les documents sollicités, qui sont relatifs au pacte enseignant - dispositif indemnitaire destiné aux personnels enseignants – sont produits ou reçus par l’ISETA-ECA dans le cadre de sa mission de service public et constituent par suite des documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration, soumis au droit d’accès ouvert par le livre III de ce code.

1. Présentation du pacte enseignant :

Le pacte enseignant, mis en œuvre à partir de septembre 2023, est un dispositif indemnitaire destiné aux enseignants accomplissant au cours d’une année scolaire, sur la base du volontariat, des missions complémentaires à leurs obligations de service.

Pour les établissements d’enseignement agricole privés sous contrat, la rémunération associée à ce dispositif se traduit par l’attribution d’une ou de plusieurs parts fonctionnelles de l’indemnité de suivi et d’orientation des élèves, venant s’ajouter à la part fixe allouée à tous les agents et à la part modulable, réservée aux personnels qui assurent une tâche de coordination tant du suivi des élèves d'une classe que de la préparation de leur orientation en concertation avec les parents d'élèves.

Les missions ouvrant droit à chaque part fonctionnelle sont soit des missions d’enseignement ou à caractère pédagogique assurées en présence d’élèves, soit des missions d’accompagnement. La nature de ces missions et leurs conditions d’exercice ont été précisées par une note de service du ministère de l’agriculture publiée le 24 août 2023. Si la mission de remplacement de courte durée correspond à un volume horaire annuel de 18 heures de face-à-face effectuées au cours de l’année scolaire, les autres missions ne sont en revanche pas quantifiées de manière précise et donnent lieu à un engagement annuel en fonction du volume de travail induit.

L’exercice de chaque mission complémentaire correspond en principe à une « brique de pacte » ouvrant droit à une rémunération de 1 250 euros bruts annuels. Le cumul de briques, par un même agent, est possible sous certaines conditions.

2. Principe de communication des documents sollicités :

2.1. S’agissant du point 1) :

La commission estime que la ventilation des moyens attribués par le ministère de l'agriculture en fonction des missions complémentaires arrêtées par le directeur de l’ISETA-ECA est librement communicable à toute personne qui en fait la demande, en application de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration. Elle émet, dès lors, un avis favorable sur ce point et prend note de la réponse du directeur de l’ISETA-ECA lui indiquant que ces informations ont été transmises aux membres du comité social et économique de l’établissement.

2.2. S’agissant du point 2) :

La commission rappelle qu’en application de l'article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, ne sont communicables qu'à l'intéressé les éléments qui portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable, et/ou dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée.

La commission rappelle que la vie privée des fonctionnaires et agents publics doit bénéficier de la même protection que celle des autres citoyens. Elle admet toutefois que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées sur le fondement du livre III du code des relations entre le public et l'administration. Il en est ainsi notamment, s'agissant de la rémunération, des composantes fixes de celle-ci.

La commission estime cependant que si les administrés doivent pouvoir accéder à certains renseignements concernant la qualité de leur interlocuteur, la protection, par l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration, de la vie privée impose que ces aménagements soient limités à ce qui est strictement nécessaire à leur information légitime.

S’agissant des éléments de rémunération, la commission est défavorable à la communication des informations liées soit à la situation familiale et personnelle (supplément familial), soit à l'appréciation ou au jugement de valeur porté sur la manière de servir de l'agent, ou encore de celles relatives aux horaires de travail, aux indemnités et heures supplémentaires.

En l’espèce, la commission estime que le pacte enseignant, qui repose sur un engagement volontaire des personnels enseignants à réaliser des missions complémentaires en plus de celles qui leurs sont confiées dans le cadre de leurs obligations de service, s’apparente à la réalisation d’heures supplémentaires par les agents concernés et traduit un choix personnel de leur part quant à l’organisation de leur temps de travail.

La commission estime, dès lors, que la communication de la liste des agents participant à ce dispositif mentionnant la quotité qui leur est attribuée au titre de ces missions complémentaires serait de nature à porter atteinte à la protection de la vie privée de ces agents.

Elle émet, dès lors, un avis défavorable s’agissant du point 2).