Avis 20237317 - Séance du 25/01/2024

Avis 20237317 - Séance du 25/01/2024

France services Pimms Médiation de Lens

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 1er décembre 2023, à la suite du refus opposé par le directeur de l’association X à sa demande de communication, par courrier électronique, d'une copie des documents suivants :
1) les statuts de l'association ;
2) le budget voté par le conseil d'administration pour les années 2022 et 2023.

La commission rappelle qu'aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Sont considérés comme documents administratifs, (…), quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’État, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission ». Selon l’article L311-1 du même code : « Sous réserve des dispositions des articles L311-5 et L311-6, les autorités mentionnées à l'article L300-2 sont tenues de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande (...) ». L’article L311-2 du même code prévoit par ailleurs que lorsqu'une administration mentionnée à l'article L300-2 est saisie d'une demande de communication portant sur un document administratif qu'elle ne détient pas mais qui est détenu par une autre administration mentionnée au même article, elle la transmet à cette dernière et en avise l'intéressé.

Pour ce qui concerne en premier lieu la qualification de personne de droit privé chargée d’une mission de service public, la commission indique que le Conseil d'État, dans sa décision du 22 février 2007, n° 264541, a jugé qu'indépendamment des cas dans lesquels le législateur a lui-même entendu reconnaître ou, à l'inverse, exclure l'existence d'un service public, une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public. Toutefois, même en l'absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l'intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l'administration a entendu lui confier une telle mission.

En l’espèce, il ressort des statuts dont la commission a pu prendre connaissance que l’association X est une association régie par la loi du 1er juillet 1901, adhérente du réseau national Pimms Médiation, dont l'objet social est de « favoriser, par la médiation sociale, l'accès aux services publics et d'améliorer la vie quotidienne des populations sur ses territoires d'intervention » et qui est composée de représentants d’entreprises (Edf, Enedis, Engie, Sncf, Keolis, Veolia, Dalkia). Il ne ressort pas des éléments dont dispose la commission qu’eu égard en particulier à ses conditions de création et d’organisation, cette association puisse être regardée comme chargée par une administration, pour l’ensemble de ses activités, d’une mission de service public.

Toutefois, l’association a été labellisée comme maison des services au public en 2017 puis France Services en 2020. La commission relève à cet égard qu’en vertu de l’article 27 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : « Afin d'améliorer, pour tous les usagers, la qualité des services au public et leur accessibilité, en milieu rural et en milieu urbain, des conventions, dénommées conventions France Services, peuvent être conclues aux niveaux départemental et infra-départemental entre l’État, des collectivités territoriales ainsi que leurs groupements et des organismes nationaux ou locaux chargés d'une mission de service public ou concourant à la satisfaction des besoins de la population./La convention, qui doit respecter un référentiel approuvé par arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales ainsi que le schéma d'amélioration de l'accessibilité des services au public prévu à l'article 26 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, définit l'offre de services proposée, qui peut être organisée de manière itinérante ou selon des modes d'accès dématérialisés, ainsi que la nature des prestations fournies. L'ensemble des services ainsi offerts porte le label « France Services ». »

Selon la convention tripartite conclue le 29 mai 2020 entre le préfet du Pas-de-Calais, les partenaires France Services (CAF, CPAM, CARSAT, DDFIP, La Poste, conseil départemental d’accès au droit-tribunal judiciaire, MSA et Pôle emploi) et les gestionnaires locaux France Services (une commune, trois établissements publics de coopération intercommunale et l’association X), le dispositif s'inscrit ainsi dans la mise en œuvre au niveau local des politiques publiques d'accès aux droits et de promotion de l'inclusion numérique définies par l’État. Il s’articule notamment autour des priorités de renforcement de l’offre de service d’accompagnement des usagers dans leurs démarches administratives, de développement de l’accessibilité des services aux publics de l’État et des collectivités locales, de l’engagement à la résolution des difficultés rencontrées par les usagers, du renforcement du maillage territorial et de financement garanti.

A cette fin, les gestionnaires France Services ont principalement pour missions l’accueil, l'information et l'orientation du public, l’accompagnement des usagers à l'utilisation des services en ligne des opérateurs partenaires, dont l’implication est obligatoire, l'accompagnement des usagers à leurs démarches administratives, la mise en relation des usagers avec les opérateurs partenaires ainsi que l'identification des situations individuelles qui nécessitent d'être portées à la connaissance des opérateurs partenaires.

La commission relève ensuite qu’outre l’adhésion obligatoire à une charte nationale d’engagement pour les gestionnaires France Services, la convention conclue impose aux structures des horaires d’ouverture minimum, définit les aménagements indispensables de leurs locaux, énumère les équipements, matériels et modalités de communication qui doivent être mis à disposition des usagers et détermine le délai maximum dans lequel elles doivent répondre aux sollicitations des usagers.

La commission note également que les agents des structures labellisées France Services doivent suivre une formation métier obligatoire initiale et continue, sont astreints aux règles du secret professionnel et peuvent connaître « des données à caractère personnel de l'usager grâce aux échanges de données entre services administratifs explicitement prévus à cette fin par les normes en vigueur et/ou car les agents représentent, pour leur mission, les services administratifs en back office auxquels ils sont adossés, et/ou car l'usager a explicitement donné mandat à l'agent de réaliser les démarches administratives en sa faveur ».

Enfin, la commission observe que la convention prévoit un comité de pilotage réunissant tous les signataires « pour fixer des actes de progrès à moyen terme pour renforcer les actions des France Services ». Les gestionnaires France Services font par ailleurs l’objet d’une évaluation quant à la conformité de l’offre à leurs engagements, à la qualité du service rendu et à l’efficience de leur gestion. Ils sont à ce titre soumis à des obligations de reporting au moins trimestriel, doivent compléter un outil de suivi de l’activité, font l’objet d’audits flash menés par l’Agence nationale de la cohésion des territoires et ont obligation de publier leurs indicateurs de résultats.

Ainsi, eu égard à l’intérêt général de l’activité confiée par la convention départementale France Services à l’association X, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu'aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, la commission considère que l'administration a entendu lui confier une mission de service public. Il suit de là que l’association X doit être regardée, pour cette activité, comme une personne morale de droit privé chargé d’une mission de service public au sens des dispositions précitées de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, soumise à l’obligation de communication des documents administratifs qu’elle détient.

En second lieu, la commission rappelle, d’une part, qu’aux termes des dispositions de l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association : « Toute association qui voudra obtenir la capacité juridique prévue par l'article 6 devra être rendue publique par les soins de ses fondateurs. La déclaration préalable en sera faite à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l'arrondissement où l'association aura son siège social. Elle fera connaître le titre et l'objet de l'association, le siège de ses établissements et les noms, professions et domiciles et nationalités de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration (…) ». L'article 2 du décret du 16 août 1901, pris pour l'application de cette loi, prévoit que « Toute personne a droit de prendre communication sans déplacement, auprès du préfet de département, des statuts et déclarations ainsi que des pièces faisant connaître les modifications de statuts et les changements survenus dans l'administration. Elle peut même s'en faire délivrer à ses frais expédition ou extrait ».

La commission rappelle, d’autre part, que l’article 10 de la loi du 12 avril 2000 précitée dispose que « Le budget et les comptes de tout organisme de droit privé ayant reçu une subvention (…) doivent être communiqués à toute personne qui en fait la demande par l'autorité administrative (…) ou par les autorités administratives qui détiennent ces documents, dans les conditions prévues par le livre III du code des relations entre le public et l'administration ».

Dès lors que l’association X est au nombre des autorités administratives énumérées aux articles L300-2, L311-1 et L311-2 du code des relations entre le public et l'administration, la commission estime qu’elle doit également être regardée comme tenue à l’obligation de communiquer à toute personne qui en fait la demande ses statuts et son budget, documents librement communicables sur le fondement des dispositions qui viennent d’être citées.

La commission estime ensuite que les statuts de cette association et son budget prévisionnel, dont elle a pu prendre connaissance, ne comportent pas de mentions relevant des intérêts protégés par les articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration.

Elle émet par conséquent un avis favorable à la demande d’avis.