Avis 20241747 - Séance du 06/05/2024
Monsieur X, journaliste, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 27 février 2024, à la suite du refus opposé par la maire de Paris à sa demande de communication de deux avis rendus les 5 et 22 novembre 2021 par la commission de déontologie de la ville de Paris concernant Monsieur X ancien adjoint à l'urbanisme de Paris entre 2014 et 2020, suite à sa prise de responsabilité dans les sociétés X à l'issue de son mandat.
En premier lieu, en réponse à la demande qui lui a été adressée, la maire de Paris a informé la commission que les documents sollicités ont été versés dans le cadre d’une procédure judiciaire. La commission rappelle toutefois que les avis élaborés par une autorité administrative, dans le cadre de ses missions de service public et en dehors de toute sollicitation du juge, revêtent le caractère de documents administratifs au sens de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration et que leur transmission à l’autorité judiciaire ne leur fait pas perdre ce caractère.
Elle rappelle ensuite qu’aux termes du f) du 2° de l’article L311-5 du code des relations entre le public et l’administration, ne sont pas communicables les documents dont la communication porterait atteinte « au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d’opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l’autorité compétente ».
Elle souligne que la seule circonstance qu'un document administratif se rapporte à une procédure en cours devant une juridiction de l'ordre judiciaire ou administratif ne saurait par elle-même faire obstacle à sa communication sur le fondement du droit d'accès aux documents administratifs, et ce même s’il a été transmis à l’autorité judiciaire et coté au dossier d’instruction du juge pénal (CE, 5 mai 2008, n° 309518) et même si la communication du document serait de nature à affecter les intérêts d'une partie à la procédure (CE, 16 avril 2012, n° 320571), qu'il s'agisse d'une personne publique ou de toute autre personne. Ce n’est, en effet, que dans l’hypothèse où cette communication risquerait d’empiéter sur les compétences et prérogatives de l'autorité judiciaire ou de la juridiction que la communication d'un document administratif peut être refusée en application du f) du 2° de l'article L311-5 du code des relations entre le public et l'administration. Tel peut être le cas lorsque la communication est de nature à porter atteinte au déroulement de l’instruction, entrave ou complique l'office du juge ou encore retarde le jugement d'une affaire (conseil n° 20092608 du 18 juillet 2009). Lorsqu’un document administratif a été transmis à l’autorité judiciaire, il appartient à l’autorité saisie d’une demande de communication de ce document de rechercher, à la date à laquelle elle se prononce, les suites données à cette transmission ou susceptibles de l’être, afin de déterminer, à moins que l’autorité judiciaire compétente ait donné son accord, si la communication du document sollicité est de nature à porter atteinte au déroulement de procédures juridictionnelles ou d’opérations préliminaires à de telles procédures en empiétant sur les prérogatives de cette autorité (CE, 30 décembre 2015, n° 372230 et CE, 21 octobre 2016, n° 380504).
Tel ne paraît pas être le cas en l’espèce, la commission relevant au surplus que la procédure judiciaire relative à la situation de l’ancien élu concerné est achevée.
En second lieu, la commission rappelle qu’elle considère que les avis alors rendus par la commission de déontologie des fonctionnaires de l’Etat sur la compatibilité avec leurs fonctions précédentes des activités privées que souhaitent exercer des fonctionnaires ou devant être placés dans certaines situations ou positions statutaires constituent des documents administratifs communicables à un tiers qui en fait la demande, en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve de l’occultation préalable des mentions relatives à la localisation et aux modalités d'exercice des activités privées que les agents publics envisagent d'exercer ainsi qu'à l'identité de leur éventuel employeur (conseil de partie II n°20072266 du 5 juillet 2007). Elle estime en revanche que les fonctions et le statut de ces personnels justifient que certaines informations les concernant puissent être communiquées, notamment, de la nature de l'activité privée envisagée et de sa compatibilité éventuelle, avec ou sans réserve, avec les fonctions administratives antérieures.
La commission considère également que les documents relatifs à l’instruction d’une demande d’autorisation de cumul d’activités présentée par un agent public ainsi qu’à l’octroi ou au refus d’une telle demande constituent des documents administratifs communicables à un tiers qui en fait la demande, en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration (conseil de partie II n°20164691 du 1er décembre 2016). Elle estime que les sujétions particulières instaurées pour encadrer la possibilité pour les agents publics d’exercer, à titre dérogatoire, d’autres activités que leur activité principale au service d’une personne publique justifient que les informations contenues dans ces documents soient communiquées à toute personne qui en fait la demande, sur le fondement de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration, sous réserve de l’occultation, sur le fondement de l’article L311-6 du même code, des éventuelles mentions de ces documents relatives à la vie privée des agents concernés (telles que leurs coordonnées personnelles, leur numéro de sécurité sociale ou, dans le cas d’une entreprise privée, la rémunération perçue au titre de l’activité pour laquelle une autorisation de cumul est demandée) ou, le cas échéant, du secret des affaires dont pourrait se prévaloir l’entreprise concernée.
En l’espèce, la commission considère que les avis rendus par la commission de déontologie de la ville de Paris, relatifs à la compatibilité avec les fonctions exercées précédemment dans le cadre de son mandat électif d’activités privées qu’un élu souhaite exercer, constituent également des documents administratifs communicables à toute personne en faisant la demande en vertu de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle estime en particulier que le mandat et les fonctions d'un élu justifient que l’appréciation portée sur la compatibilité ou non de l’activité privée avec les fonctions électives antérieures puisse être communiquée. Doivent en revanche être occultées les éventuelles mentions relatives à la vie privée de l’élu (telles que ses coordonnées personnelles ou la rémunération prévue au titre de l’activité prévue) ou, le cas échéant, au secret des affaires de l’entreprise concernée.
La commission, qui n’a pas pu prendre connaissance des documents sollicités, émet par suite un avis favorable à la demande, sous ces seules réserves.