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Avis 20247168 - Séance du 12/12/2024
Madame X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 23 octobre 2024, à la suite du refus opposé par le président de la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes à sa demande de communication du document intitulé « accusé de réception », attestant de la réception de son recours hiérarchique X que le procureur général a transmis à la chambre.
En l'absence de réponse du président de la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Rennes à la date de sa séance, la commission rappelle que les chambres de notaires, qui sont des établissements d'utilité publique en vertu de l'article 3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, sont chargées d’une mission de service public au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration (CE, 29 juillet 1994, n° 105023). Les documents qu'elles détiennent ou élaborent dans le cadre de cette mission, dès lors qu'ils sont en lien avec l'organisation du notariat, revêtent donc le caractère de documents administratifs soumis au droit d'accès institué par ce même code.
Cependant, la commission rappelle que ne présentent pas de caractère administratif et n'entrent pas dans le champ du droit de communication institué par le titre III du code des relations entre le public et l'administration, tous les documents relatifs à une procédure juridictionnelle, qu'elle soit de nature civile, pénale ou commerciale. Il en va ainsi, notamment des jugements, ordonnances, décisions ou arrêts rendus par les juridictions de l'ordre judiciaire ou administratif. C'est aussi le cas, plus largement, des décisions du parquet, des dossiers d'instruction, des procès-verbaux d'audition, des rapports d'expertise ou des mémoires et observations des parties - c'est à dire de l'ensemble des pièces de procédure proprement dites - mais aussi des documents de travail internes à une juridiction, destinés à leurs membres et concourant à l'instruction des affaires ou à la formation des jugements (CE, 28 avril 1993, n° 117480). Ainsi, les documents, quelle que soit leur nature, qui sont détenus par les juridictions et qui se rattachent à la fonction de juger dont elles sont investies, n’ont pas le caractère de document administratif au sens du livre III du code des relations entre le public et l'administration (CE, 7 mai 2010, n° 303168).
Dans une décision n° 474435 du 19 novembre 2024, le Conseil d’État a ainsi jugé que les documents qui conduisent à la saisine des instances disciplinaires des avocats, qui constituent des organes juridictionnels, et ceux qui sont établis au cours de la procédure disciplinaire proprement dite, se rattachent à la fonction juridictionnelle et n’ont, dès lors, pas le caractère de documents administratifs, sans qu’ait d’incidence à cet égard le fait que le bâtonnier décide ou non de saisir l’instance disciplinaire.
En l'espèce, la commission relève que les articles 7 et suivants de l'ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels ont institué, pour la discipline des notaires, une procédure particulière, confiée, en application de l'article 11, à des chambres de discipline, instituées auprès des instances professionnelles régionales ou interrégionales des notaires et, en appel, à une cour nationale de discipline, dont les arrêts peuvent eux-mêmes faire l'objet d'un pourvoi devant la Cour de cassation.
La commission constate que la procédure disciplinaire des notaires est de nature juridictionnelle, comme celle des avocats. Elle en déduit que les documents établis au cours de cette procédure, quelle qu’en soit sa phase, se rattachent à la fonction juridictionnelle et n’ont pas le caractère de documents administratifs. Elle souligne qu’il en est de même pour les documents produits ou reçus dans le cadre de la phase préliminaire à la procédure disciplinaire proprement dite, quand bien même cette dernière ne serait pas diligentée in fine.
En l’espèce, la commission comprend que le document sollicité est l’accusé de réception d’une réclamation, au sens de l’article 4 de l’ordonnance du 13 avril 2022 déjà citée, formée par Madame X à l’encontre de son notaire. Elle considère que ce document, élaboré en vue d’une éventuelle procédure disciplinaire, présente un caractère juridictionnel.
La commission ne peut, par suite, que se déclarer incompétente pour se prononcer sur la demande d’avis.