Conseil 20254940 - Séance du 04/09/2025

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Conseil 20254940 - Séance du 04/09/2025

Conseil national de l'Ordre des Pharmaciens

La Commission d'accès aux documents administratifs a examiné lors de sa séance du 4 septembre 2025 votre demande de conseil relative à la qualification et, le cas échéant, aux modalités de réutilisation d'informations publiques au sens des dispositions du titre II du livre III du code des relations entre le public et l'administration (CRPA) applicable à la diffusion sur le site internet de l'Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) de données issues de l’annuaire des pharmaciens et établissements accessible sur le site internet du Conseil national de l'ordre des pharmaciens :
1) Le 3° de l’article L312-1-1 du CRPA doit-il être interprété comme s’opposant à une multiplicité de diffuseurs d’une même base de données ?
2) L’ajout de données nouvelles par l’administration demandeuse, comme l’a fait l’ADEME (ajout des coordonnées GPS et du service que le citoyen peut effectuer au sein de l’établissement pharmaceutique), aux données issues de l’annuaire des pharmaciens et établissements, a-t-il pour effet de constituer une information nouvelle au sens des dispositions du CRPA, de sorte que la base résultante ne puisse plus être considérée comme identique à celle initialement diffusée ?
3) L’article L321-1 du CRPA est-il applicable à une demande telle que celle de l’ADEME de telle sorte que la rediffusion d’une base de données diffusée par l’ordre national des pharmaciens s’apparenterait à une réutilisation « à d’autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus » ?
4) La réutilisation par l’administration demandeuse peut-elle être considérée comme un « échange d’informations publiques entre les administrations, aux fins de l’exercice de leur mission de service public », de telle sorte que, conformément à l’alinéa 5 de l’article L321-2 du CRPA, cet échange « ne constitue pas une réutilisation au sens du présent titre » ?
5) Dans cette hypothèse, cela signifie-t-il que les articles L321-1 à L327-1 du CRPA ne sont applicables à l’administration demandeuse ?
6) Le cas échéant, cela signifie-t-il que l’administration demandeuse serait autorisée ou contrainte de republier les données de l’annuaire des pharmaciens et établissements, conformément aux articles L312-1 et L312-1-1 du CRPA ?

A titre liminaire, la commission vous rappelle qu’aux termes de l’article L321-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Les informations publiques figurant dans des documents communiqués ou publiés par les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite à d'autres fins que celles de la mission de service public pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus. / Les limites et conditions de cette réutilisation sont régies par le présent titre ».

La commission vous rappelle également qu’il résulte des dispositions du dernier alinéa de l’article L321-2 du code des relations entre le public et l’administration que « l'échange d'informations publiques entre les administrations, aux fins de l'exercice de leur mission de service public, ne constitue pas une réutilisation au sens du présent titre ».

La commission ajoute qu’en application de l’article 1er de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique, sous réserve des articles L311-5 et L311-6 du code des relations entre le public et l'administration et sans préjudice de l'article L114-8 du même code, les administrations mentionnées au premier alinéa de l'article L300-2 dudit code sont tenues de communiquer, dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les documents administratifs qu'elles détiennent aux autres administrations mentionnées au même premier alinéa de l'article L300-2 qui en font la demande pour l'accomplissement de leurs missions de service public. Par ailleurs, les informations figurant dans des documents administratifs communiqués ou publiés peuvent être utilisées par toute administration mentionnée audit premier alinéa de l'article L300-2 qui le souhaite à des fins d'accomplissement de missions de service public autres que celle pour les besoins de laquelle les documents ont été produits ou reçus. Enfin, ce même article précise qu'à compter du 1er janvier 2017, l'échange d'informations publiques entre les administrations de l’État, entre les administrations de l’État et ses établissements publics administratifs et entre les établissements publics précités, aux fins de l'exercice de leurs missions de service public, ne peut donner lieu au versement d'une redevance.

La commission estime qu’il se déduit des dispositions du dernier alinéa de l’article L321-2 du code des relations entre le public et l’administration que les dispositions du titre II du livre III de ce code ne sont pas applicables à la communication et à la réutilisation de documents administratifs entre administrations agissant dans le cadre de leurs missions de service public, seules les dispositions de l’article 1er de la loi du 7 octobre 2016 étant alors applicables.

Pour répondre à vos différentes interrogations, il convient de déterminer si l’utilisation par l’ADEME des données issues de l’annuaire des pharmaciens et établissements que vous diffusez en ligne a le caractère d’une réutilisation d’informations publiques au sens de l’article L321-1 du code des relations entre le public et l’administration ou d’un échange d’informations publiques entre administrations au sens du dernier alinéa de l’article L321-2 du même code.

A cet égard, la commission relève, tout d’abord, que le Conseil national de l'ordre des pharmaciens est un organisme chargé de la gestion d’un service public au sens de l'article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration (avis n° 20172392 du 21 juillet 2017). En vertu des articles L4221-16 et D4221-26 du code de la santé publique, il lui incombe de porter à la connaissance du public, au moyen d’un service de communication en ligne tenu à jour, la liste des pharmaciens inscrits au tableau.

La commission constate, ensuite, que l’ADEME est un établissement public à caractère industriel et commercial qui exerce, conformément aux dispositions de l’article L131-3 du code de l’environnement, des actions, notamment d'orientation et d'animation de la recherche, de prestation de services, d'information et d'incitation dans chacun des domaines suivants :
1° La prévention et la lutte contre la pollution de l'air ;
2° La prévention de la production de déchets, dont la lutte contre le gaspillage alimentaire ; la gestion des déchets ; la transition vers l'économie circulaire ; la protection des sols et la remise en état des sites pollués ;
3° Le réaménagement et la surveillance d'une installation de stockage de déchets ultimes autorisée après le 14 juillet 1992, lorsque ces opérations sont rendues nécessaires du fait d'une défaillance ou d'une insuffisance des garanties de l'exploitant ;
4° La réalisation d'économies d'énergie et de matières premières et le développement des énergies renouvelables, notamment d'origine végétale ;
5° Le développement des technologies propres et économes ;
6° La lutte contre les nuisances sonores ;
7° La lutte contre le réchauffement climatique et l'adaptation au changement climatique ;
8° Le suivi statistique des installations agrivoltaïques définies à l'article L. 314-36 du code de l'énergie.

Elle relève que la base de données que vous diffusez en ligne permet à l’ADEME de mettre à la disposition de tous la liste des pharmacies qui collectent les médicaments à usage humain non utilisés. Elle estime donc que l’utilisation par l’ADEME des données de l’annuaire des pharmaciens et établissements pour la constitution d’une liste des acteurs de l’économie circulaire, elle-même mise en ligne sur son site internet, peut être regardée comme s’inscrivant dans le cadre de l’exercice de sa mission de service public.

La commission en déduit que, conformément au dernier alinéa de l'article L321-2 du code des relations entre le public et l’administration, les échanges d'informations publiques ainsi réalisés entre l’Ordre national des pharmaciens et l'ADEME ne constituent pas une réutilisation au sens de l'article L321-1 du même code.

L’ADEME n’est donc pas soumise aux règles générales de réutilisation prévues aux articles L322-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration et n’est, dès lors, pas tributaire d’une demande de réutilisation pour utiliser les informations figurant dans cette base de données.

La commission vous rappelle que, pour autant, cela ne saurait faire obstacle à l'application des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, s'agissant d'un traitement de données à caractère personnel.

Enfin, la commission vous indique que si le 3° de l’article L312-1-1 du code des relations entre le public et l’administration fait obligation aux administrations de publier les bases de données qu’elles produisent ou qu’elles reçoivent, ces dispositions ne font pas obstacle, en elles-mêmes, à ce qu’une base de données soit diffusée par plusieurs administrations. Elle précise en outre que la base de donnée enrichie par l’ADEME constitue une nouvelle base de données, que l’ADEME se doit de diffuser en application de ces mêmes dispositions.

Tels sont, en l'état des informations que vous avez portées à sa connaissance, les éléments de réponse que la commission est susceptible de vous apporter.