Le principe du libre accès du public aux documents administratifs constitue l’une des pierres angulaires de toute société démocratique en garantissant la transparence des activités des administrations publiques. Aujourd’hui, la plupart des pays européens comme la Suède, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Italie, l’Espagne ainsi que les États-Unis ont reconnu ce droit aux citoyens.
Un droit reconnu récemment
La législation la plus ancienne est celle de la Suède, qui reconnaît le droit d’accès depuis 1776, droit réaffirmé par la loi constitutionnelle de 1974. Les législations des autres pays sont beaucoup plus récentes : le « Freedom of Information Act » (FOIA) aux États-Unis date de 1966 ; la constitution espagnole reconnaît le droit à l’information depuis 1978 ; l’Italie depuis la loi du 7 août 1990 ; en Grande-Bretagne les deux lois qui concernent le droit d’accès sont entrées en vigueur en 2005 ; et en Allemagne la loi fédérale sur le sujet est entrée en vigueur en 2006.
Comme en France, la liberté d’accès s’étend à tous les documents et informations détenus par l’administration publique, sous quelque forme que se soit, ce qui exclut le plus souvent les documents se rattachant directement au Gouvernement, au pouvoir juridictionnel ou au pouvoir législatif. Toutefois, en Grande-Bretagne, le droit à l’information s’étend aux assemblées parlementaires.
La Suède a le système le plus libéral, reconnaissant même aux agents publics la liberté d’expression et de partager avec des tiers les informations dont ils disposent.
Des limites au droit d’accès largement partagées
Le droit d’accès aux documents administratifs connaît des limites qui sont sensiblement les mêmes d’un pays à l’autre. Figurent parmi les motifs de refus de communication : la publication du document, comme en Allemagne ou en Grande-Bretagne ; partout la protection de la sécurité nationale, de la défense, de la politique étrangère, de la politique nationale monétaire ou économique, de la vie privée, du secret industriel et commercial. Dans la plupart des pays, les documents relatifs au déroulement des procédures juridictionnelles, ainsi que les documents concernant la prévention et la répression de la criminalité ne sont pas communicables. Comme dans le régime français, en Italie, en Allemagne et aux États-Unis, les actes préparatoires à des décisions ne sont pas communicables avant que les décisions soient prises.
Quelques variations sur les conditions d’accès
Dans certains pays, nombre de documents administratifs font l’objet d’une publication automatique et sont directement accessibles par les citoyens, comme aux États-Unis.
En l’absence de publication, le citoyen doit s’adresser à l’administration qui détient le document en respectant diverses conditions de fond et de forme. Dans la plupart des pays, la demande est ouverte à toute personne sans condition de nationalité ni de résidence, ce qui correspond au régime français. La Grande-Bretagne et les États-Unis exigent une demande écrite, alors qu’en Allemagne, comme en France, aucune forme n’est requise. L’administration dispose par la suite d’un délai d’environ un mois pour répondre.
Dans la plupart des pays, la communication d’un document ne donne pas lieu au paiement d’une redevance, sauf si les dépenses de l’administration dépassent un certain seuil, contrairement à la France, où l’administration peut toujours facturer les frais de reproduction et d’expédition. Cependant, en Allemagne, l’administration est en droit de facturer la communication selon des tarifs fixés par règlement.
Les différents organismes chargés de veiller au droit d’accès
Certains pays ont des organismes comparables à la CADA française, qui sont chargés de veiller au respect du droit d’accès aux documents administratifs.
En Allemagne, c’est le Commissaire fédéral de la protection des données et du droit à l’information, qui, au niveau fédéral, veille au respect du droit à l’accès, en plus de la protection des données personnelles. Autorité indépendante, le Commissaire a un rôle de conseil auprès des particuliers, des personnes morales, du Parlement et du Gouvernement et s’efforce de promouvoir la coopération européenne et internationale. Il peut contrôler les administrations du Bund et constater des violations. Comme la CADA française, il peut être saisi en cas de refus de communication. Dépourvu de tout pouvoir de sanction, le Commissaire ne peut rendre que des simples avis, qui n’ont pas de caractère contraignant.
En Italie, la Commission pour l’accès aux documents administratifs (CADA), comme la CADA française, est un organisme indépendant chargé de veiller spécialement à l’accès aux documents administratifs. Elle contrôle le respect de ce droit et peut rendre un avis en cas de refus de communication après audition des parties. Elle dispose d’un vrai pouvoir de décision et peut ordonner à l’administration de produire un document, l’administration ayant alors l’obligation de revoir sa décision.
La Grande-Bretagne a instauré, en Angleterre et en Écosse, un « Information Commissioner Office » (ICO), organisme indépendant, qui sert à garantir l’accès aux documents administratifs et qui veille également à la protection des données personnelles. L’« Information Commissioner » a une mission de conseil et contrôle le respect de la loi en prononçant des recommandations auprès des administrations. Il peut être saisi en cas de refus de communication et est en charge de l’éducation et de la sensibilisation des particuliers et des entreprises à l’accès à l’information. L’« Information Commissioner » peut rendre des ordonnances exécutoires, et dispose en outre d’un pouvoir de sanction et peut enfin infliger des amendes en cas d’atteinte au « Data Protection Act ».
L’Espagne dispose d’une entité particulière qui n’est pas comparable à la CADA : la Commission supérieure d’évaluation des documents administratifs, qui s’occupe des questions de conservation patrimoniale et du cycle de vie des documents administratifs.
Voies de recours en cas de refus de communication
En cas de refus de communication, le demandeur dispose de plusieurs voies de recours : dans la plupart des pays, les citoyens peuvent former un recours gracieux ou hiérarchique auprès de l’administration. En Suède, le demandeur peut saisir l’Ombudsman du Parlement qui procède à une médiation.
Avant d’intenter un recours contentieux, les demandeurs peuvent s’adresser aux organismes spécifiques susmentionnés, lorsqu’il en existe un dans leur pays.
En Allemagne, la saisine du Commissaire fédéral n’est pas obligatoire et n’a pas d’effet suspensif sur les délais du recours contentieux. En Italie, les demandeurs peuvent intenter un recours devant la CADA italienne, ce qui suspend le délai pour le recours devant le tribunal administratif régional. En Grande-Bretagne, après avoir épuisé les voies de recours internes de l’administration, le demandeur peut s’adresser l’« Information Commissioner ».
Dans tous les pays, le demandeur peut intenter un recours contentieux devant les tribunaux pour faire valoir ses droits.