En vertu des dispositions de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, le service de l’aide sociale à l’enfance (ASE) est un service du département, placé sous l’autorité du président du conseil départemental et dont la mission essentielle est de venir en aide aux enfants et à leur famille par des actions de prévention individuelle ou collective, de protection et de lutte contre la maltraitance.

Il convient de souligner, à titre liminaire, que les documents qui concernent directement un enfant mineur ne sont pas communicables à une autre personne, même si celle-ci en assure la représentation légale, lorsque s’y oppose l’intérêt supérieur de l’enfant, protégé par l’article 3 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant (20152463, 20236039). C’est au vu des circonstances propres à chaque situation qu’il convient d’apprécier l’intérêt supérieur de l’enfant. La protection de cet intérêt pourra ainsi s'opposer à la communication aux parents de l'enfant des documents faisant apparaître qu’il les met gravement en cause.

Dossier d’aide sociale à l’enfance

Le dossier d’ASE est composé de tout document administratif, médical, socio-éducatif ou juridique relatif au jeune qui fait l'objet d'un accompagnement par le service de l’ASE, détenu par ce service. La communication des pièces composant le dossier d’ASE diffère en fonction de l’état de la procédure et de l’objet en vue duquel elles ont été élaborées (20201272).

1) Avant que le juge des enfants soit saisi ou que le procureur de la République soit avisé, l’ensemble des pièces qui composent ce dossier revêtent un caractère administratif et sont en principe communicables, sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Il en va ainsi, en particulier, des documents relatifs au placement administratif du mineur (2016400320240487).

2) Lorsque le juge des enfants a été saisi ou que le procureur de la République a été avisé en application de l’article L. 226-4 du code de l’action sociale et des familles et de l’article 375-5 du code civil, les documents élaborés dans le cadre de la procédure ainsi ouverte (c'est-à-dire en vue de la saisine du juge judiciaire ou à la demande de celui-ci), constituent des documents judiciaires exclus du champ d’application du livre III du code des relations entre le public et l’administration. La Commission n’est donc pas compétente pour se prononcer sur leur communication (2015538520165289, 20236452).

La Commission considère également que le courrier par lequel l’administration dénonce, en application de l’article 40 du code de procédure pénale, des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale, constitue une pièce relevant de l’autorité judiciaire, ne relevant pas du droit d’accès prévu par le livre III du code des relations entre le public et l’administration (20163903).

De même, en cas de placement judiciaire du mineur, les documents établis par le juge, qu’il s’agisse de ses décisions (renouvellement du placement, modifications des mesures d’assistance éducative) ou de courriers qu’il adresse aux services d’ASE, ainsi que ceux élaborés à l’attention de ce dernier par l’administration dans le cadre du mandat judiciaire qui lui a été confié, revêtent un caractère judiciaire. C’est le cas notamment des rapports périodiques sur la situation et l’évolution du mineur obligatoirement adressés au juge des enfants en vertu de l’article 1199-1 du code de procédure civile et du dernier alinéa de l’article 375 du code civil. Il n’appartient qu’au juge de procéder à la communication de tels documents s’il l’estime opportun (2016469520247810).

3) En revanche, les autres documents élaborés par les autorités administratives dans le cadre du placement judiciaire du mineur (correspondances entre les services intéressés, rapports et notes établis pour les besoins de l’administration, pièces retraçant les échanges entre le président du conseil départemental et les parents du mineur ou les accueillants familiaux) revêtent un caractère administratif et le conservent alors même qu’ils auraient été transmis au juge pour information. Ils sont par conséquent communicables, dans les conditions et sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration (2016521420236452).

4) Tous les autres documents et rapports, qui n’ont pas été établis pour les besoins ou dans le cadre d’une procédure judiciaire, conservent un caractère administratif même dans le cas où ils auraient été transmis à l’autorité judiciaire. Ils sont donc en principe communicables à la personne directement concernée, ou, lorsqu’il s’agit d’un mineur, à ses représentants légaux, sous les réserves prévues par le livre III du code des relations entre le public et l’administration (CRPA) (20237964). 

Les articles L. 311-6 et L. 311-7 du CRPA imposent, avant toute communication, la disjonction des pièces ou l’occultation des mentions dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée d’autres personnes que le demandeur ou au secret médical, portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une tierce personne physique, ou faisant apparaître le comportement d’une tierce personne, autre qu’une personne chargée d’une mission de service public, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice. Il en va ainsi des signalements ou des témoignages lorsque leur auteur est identifié ou identifiable (2015538520234414, 20245994, 20244021, 20245721). De même et ainsi qu'il a déjà été indiqué, les documents qui concernent un enfant mineur ne sont pas communicables à une autre personne, même si celle-ci en assure la représentation légale, lorsque s’y oppose l’intérêt supérieur de l’enfant, protégé par l’article 3 de la convention internationale relative aux droits de l’enfant (2015246320236039). 

Focus : recueil d’informations préoccupantes

L’information préoccupante est une information transmise à la cellule départementale de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 226-3 du code de l’action sociale et des familles, pour alerter le président du conseil départemental sur la situation d’un mineur pouvant laisser craindre que sa santé, sa sécurité ou son éducation sont en danger ou risque de l’être. Les fiches de recueil d'informations préoccupantes et les rapports d’évaluation subséquents, établis au sein de cette cellule, constituent des documents administratifs (2016515920231727), sauf à ce qu’ils aient été établis pour les besoins ou dans le cadre d’une procédure judiciaire.

Ils conservent un caractère administratif, même dans le cas où ils auraient été transmis à l’autorité judiciaire, et sont en principe communicables à la personne directement concernée, ou, lorsqu’il s’agit d’un mineur, à ses représentants légaux, sous les réserves suivantes :

  • doivent être préalablement disjointes ou occultées les pièces ou les mentions dont la communication porterait atteinte au déroulement des procédures engagées devant les juridictions ou d'opérations préliminaires à de telles procédures, sauf autorisation donnée par l'autorité compétente, en vertu du f) du 2° de l’article L. 311-5 du code des relations entre le public et l’administration ;
  • ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs faisant apparaître le comportement d’une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice en application du 3° de l'article L. 311-6 de ce code (20163455). La Commission estime que l’identification de l’auteur d’un signalement fait apparaître de la part de celui-ci un comportement dont la divulgation pourrait porter préjudice à son auteur. Elle considère par suite que, lorsque le signalement est le fait d'une personne physique (et non celui d’une autorité administrative agissant dans l’exercice de sa compétence, comme par exemple un enseignement ou le directeur d'une école), le document est communicable à elle seule, à l'exclusion des personnes visées par l'information préoccupante, à moins que des occultations ne permettent de faire obstacle à l'identification de son auteur (20164727,  20165018,). La communication d’un signalement émanant d'un tiers à l’un des parents de l’enfant n’est donc permise que dans le cas où aucune des mentions qu’il comporte n’est susceptible de permettre d’identifier son auteur et où elle ne met pas en cause la vie privée ou le comportement d’un tiers, y compris l’autre parent (2016530120247789).

Dossier des assistants maternels et familiaux

Les dossiers d’agrément des assistants maternels et des assistants familiaux, qui comportent les pièces nécessaires à la délivrance de l’agrément et à sa gestion, contiennent des documents administratifs communicables aux intéressés, soit aux personnes ayant reçu ou sollicité l’agrément, dans les conditions prévues par le livre III du CRPA.

1) Cependant, dans le cas où des pièces de nature judiciaire sont versées dans le dossier administratif d’un assistant maternel ou d’un assistant familial, la Commission estime qu’elles n’acquièrent pas de ce seul fait un caractère administratif (20171437).

Dans le cas où une procédure a été engagée devant une juridiction à l'encontre ou par un assistant maternel ou familial, la circonstance que des documents issus du dossier administratif de ce dernier aurait été transmis au juge dans le cadre de l'instance engagée devant lui, ne fait pas par principe obstacle à leur communication. Ce n'est que dans l'hypothèse où il existerait un risque d'atteinte au déroulement des procédures engagées devant cette autorité, au sens du f) du 2° de l’article L. 311-5 du code des relations entre le public et l'administration, que leur communication pourrait être refusée. Le Conseil d'État a jugé qu'il en va ainsi lorsque la communication risque d’empiéter sur les compétences et prérogatives du juge (CE 21 octobre 2016 n° 380504).

2) La CADA considère que les documents composant le dossier d’agrément d’un assistant maternel ou d’un assistant familial sont des documents administratifs communicables à l’intéressé, sur le fondement de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration (201751222023406620250408).

Toutefois, le droit d’accès fondé sur la loi générale s’efface lorsqu’une procédure de non-renouvellement, suspension ou retrait de l’agrément est en cours. Dans ce cas, seules s’appliquent alors les dispositions spéciales prévues par le code de l’action sociale et des familles, que la Commission n’est pas compétente pour interpréter, tant pour ce qui concerne les documents devant figurer au dossier de l’assistant que pour ce qui concerne la possibilité de procéder au retrait d’un agrément sur le seul fondement de courriers de signalement émanant de tiers (20175122, 20234066).

Une fois la procédure achevée, le dossier d’agrément de l’intéressé lui est en principe communicable en application de l’article L. 311-6 du code des relations entre le public et l’administration.

Dans ce cadre, en application de ce même article L. 311-6, ne sont toutefois communicables qu'à l'intéressé les documents dont la communication porterait atteinte à la vie privée, portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice.

La Commission considère, sur ce fondement, que les documents tels que les lettres de signalement ou de dénonciation adressées à une administration, dès lors que leur auteur est identifiable et que cet auteur n'est pas un agent d’une autorité administrative agissant dans le cadre de sa mission de service public, ne sont pas communicables à des tiers, y compris lorsque ceux-ci sont visés par le signalement ou la dénonciation en question. À défaut de pouvoir rendre impossible l'identification de leur auteur, l'intégralité de ces propos doit être occultée. Lorsqu'une telle occultation conduirait à priver de son sens le document sollicité, sa communication doit être refusée (2023517420246994).

Date maj Fiche